Ouf !
Heureusement il en reste un : le Saint-Fons Jazz Festival qui a démarré et se prolonge jusqu’au samedi 3 février. Seul contre tous ceux qui disparaissent ou ont disparu, il maintient le cap, son cap, au cœur de l’hiver en étalant sur deux semaines coups de cœur et révélations. L’an dernier, l’édition s’était terminée de belle façon au Marché-Gare avec l’Imperial, énergique et tonitruant.
Cette année, nous voici à la 19ème édition de ce festival emmenée par l’Ecole de Saint-Fons, ses profs et ses élèves. Le chiffre est d’ailleurs trompeur tant Saint-Fons a été bien avant le réceptacle de concerts précieux qui étaient donnés, avec une régularité de métronome, dans un « caveau » inattendu qu’on rejoignait quelque part à partir de la Route de Vienne.
19 éditions qui martèlent en tout cas qu’à Lyon, le jazz a toujours préféré s’épanouir en banlieue jusqu’à ce que des équipes municipales marquées par la grâce en décident autrement. Ce qui explique qu’aujourd’hui, Saint-Fons est ainsi le seul événement « jazz festival » survivant de l’agglomération lyonnaise.
Conclusion : mieux vaut ne pas louper les quatre derniers rendez-vous qui vous sont proposés d’ici samedi.
Premiers d’entre eux, mercredi, Okalala d’une part et Bey Ler Bey. D’un côté une alchimie sax-vibraphone-contrebasse qui fonctionne quasi acoustiquement malgré la présence des « machines » qui viennent ponctuer avec irrévérence les thèmes du trio. De l’autre, une musique aux accents Balkans indéniables qui mêle un trio clarinette-accordéon et percussions. On sera notamment attentif aux accents de la clarinette, instrument dont la particularité est de se métamorphoser du tout au tout selon le terrain de jeu choisi.
Jeudi, rendez-vous avec le Origlio – Alem-Edouard Trio, né (comme son nom l’indique presque) sous l’impulsion du pianiste Alfio Origlio.
Une alchimie d’autant plus réussie que les trois musiciens défrichent avec un rare bonheur des paysages sonores largement inédits.
Leur alliance est déjà en soi un poème : entre les claviers pointillistes de l’un, les percussions qui vont et viennent de l’Inde à l’Europe de l’autre et la voix aux sonorités complexes du troisième, on est en présence d’une architecture qui se construit et se renouvèle à chaque instant, sans cesser de surprendre.
Vendredi, rendez-vous avec un instrument rare, l’harmonica. Aux commandes, le multi-instrumentiste William Galison, qui n’en est évidemment pas à son coup d’essai. Voilà à peu près 30 ans, que le musicien -qui rappelle à l’occasion qu’il fut le seul du Berklee College à constituer la section « harmoniciste »- hante les scènes et escorte petites et grandes pointures. Jusqu’à en devenir une lui-même.
Il fut aux côtés de Peggy Lee, donna la réplique à Sting et se fit remarquer aux côtés de Madeleine Peyroux, étoile fulgurante. Cette fois, il est avec l’Odysseus Fantasy pour quelques moments rares : l’équipée prend ses origines dans la rencontre de Karim Maurice qui, d’ailleurs, signe les compositions de la formation.
Enfin, samedi soir, rendez-vous comme d’habitude au Marché-Gare qui accueille le Skokiaan Brass Band. Ca devrait évidemment déménager : le band fondé il y a cinq ans par François Rigaldiès rassemble pas moins de 8 cuivres et deux percussions. On ne s’étonnera pas de retrouver en son sein des musiciens familiers de la scène lyonnaise qui ont leurs habitudes dans d’autres formations (Bigre, Big Band de l’œuf etc). C’est festif. Joyeux. Dansant.
Bref, une intéressante édition qui consacre chaque soirée comme un événement en soi, aux antipodes de ses voisines, comme pour mieux faire comprendre et admettre l’originalité inhérente de cette musique.
-Saint Fons Jazz Festival. Jusqu’au samedi 3 février. Tous les soirs à 20 h 30, sauf le dernier soir, samedi 3, au Marché-Gare à Confluence. Salle Jean-Marais. Réservations : www.saint-fons-jazz.fr