Ordinairement, lors de la conférence de presse du programme d’A Vaulx Jazz (du 6 au 25 mars 2017), on aurait eu droit à une présentation festive et rigolote, prenant le temps d’entrer dans le détail. Un lieu fait pour ça. Des vidéos et des traces musicales en veux-tu, en voilà. Histoire d’escorter la présentation de Robert Lapassade et du directeur d’A Vaulx Jazz en exercice. Gilbert Chambouvet, Thierry Serrano, Charlène Mercier. Un rite, une façon de faire, un plaisir non dissimulé de lancer le festival, annonce du printemps et tutti jazzi.
Et là. Patatras ! Une salle passe-partout et sombre, Décor quelconque. Deux élus peu à l’aise assis derrière une table. Un dossier de presse réduit à sa simple expression et, pour couronner le tout, une affiche, l’affiche du festival, n’exprimant rien ou tout ce qu’on veut, façon tract amateur des années 80. Où sont les chefs d’oeuvre de Bruno Théry, qui auront embelli, trente ans durant, le festival de ses montages abracadapicaresques ?
Quelques mots du maire en exercice et de son adjointe à la culture. Rien qu’on ne sache déjà si ce n’est cette gêne palpable devant ce qui s’annonce comme une mort programmée du festival ou, à tout le moins, sa mise entre parenthèses. Où sont les élans d’antan, quand A Vaulx Jazz sonnait comme le réveil musical de toute une agglomération ?
A quand le prochaine Festival : 2018, 2019…2031 ?
Pour finir, on demande à la directrice du festival, Charlène Mercier, -mais elle n’en a pas tout à fait le titre, allez comprendre- d’expédier rapido le programme. A l’évidence, ça ne semblait pas prévu. Dans la salle, allez comprendre encore, Robert Lapassade, condamné à se taire, lui la plus belle voix du festival qui sait vous introduire, mieux que personne, tout ce que l’arrivée de tel ou tel artiste à Charlie Chaplin a de surprenant, d’important et de diabolique . Oubli ? Dédain ? On ne sait. En tout cas, finie la fête. Bonjour la langue de bois. Aux questions pressantes de la petite assistance et qui n’auront porté que sur l’avenir flou du festival, on n’eut droit qu’à un maigre : « On vous promet qu’il y aura une 31ème édition », Mais à quelle date ? Impossible de savoir : 2018, 2019….. 2031 ? Au retour du PCF aux affaires de Vaulx-en-Velin ?
On sera reparti bredouille.
A l’évidence, l’important est surtout d’en venir à ce festival des « Cultures urbaines », promis, annoncé, sussuré, source de tous les engouements de pacotille. Eternel débat d’une culture qui tente d’éclairer et de son ersatz qui se contente de caresser dans le sens du poil.
Comme si A Vaux Jazz n’était pas par essence un festival des cultures urbaines. Replongez-vous dans le programme des trente ans qui se sont écoulés : Jazz, cinéma, rap, reggae, blues, caraïbes, free, soupe popu, flamenco, Louisiane, Maghreb, Afrique, Europe de l’Est, Corée n’ont cessé de se croiser et de se lier durant ces trois décennies. Au point qu’on se disait que le jazz avait bon dos de s’ouvrir tant et tant vers ses innombrables progénitures.
Dans tout cela, manque le plus important : comment, pourquoi une équipe municipale qui arrive aux affaires estime que l’une de ses priorités est d’estomper ce qui est le plus bel évènement culturel d’une ville qui a bien du mal à briller ? A Vienne, passée de Louis Mermaz à un proche de Laurent Wauquiez, bizarrement, le consensus sur le festival a perduré. S’est même renforcé.
350 000 euros, le coût du Festival
A Vaulx, pas un mot, pas d’explication si ce n’est qu’A Vaulx Jazz coûterait -tout compris- 350 000 euros et que ça plomberait la nouvelle politique culturelle de la nouvelle municipalité. On se garde bien en revanche de vous dire combien ça rapporte en termes de notoriété, de retombées culturelles et sociales et de pari sur l’avenir.
De toutes façons, magie de nos moeurs politiques, n’aura cessé de se renforcer, durant cette conférence de presse, la conviction que les élus présents ne faisaient qu’appliquer des consignes édictées par d’autres. Rendez-vous en mai ou juin prochain au terme de différentes échéances politiques, expliquait, patiemment, M. Dussurgey, le maire qui a succédé à Hélène Geoffroy, nommée au gouvernement, mais qui pourrait revenir à la mairie dans les mois qui viennent.
Certes, gardons nous de tout procès d’intention. Mais pour les trente ans de ce qui est le plus beau festival de jazz de l’agglomération lyonnaise, on sera reparti encore un peu plus inquiet que l’an dernier…