Jazz In Lyon

Festival Récif: Incandescents, intimistes et inlassablement explorateurs, un festival sans frontières !

Une semaine exaltante proposée par le festival Récif, festive et résolument transe jeudi 3 avril avec Parranda La Cruz et Saräb, plus intimiste le vendredi 5 avril  à l’écoute du duo d’improvisateurs inspirés Fred Frith et Susana Santos Silva et pour bouquet final, une soirée plus jazz avec Y-Otis et le duo Obradovic-Tixier.

 

Jeudi 3 avril au Marché Gare

 

Parranda la Cruz : une soirée de fusion, d’énergie et d’engagement!

le Marché Gare à Lyon s’est transformée en un véritable chaudron de rythmes endiablés grâce à la brûlante prestation de Parranda la Cruz, deux chanteuses et deux percussionnistes. Si le groupe franco-latino a su captiver l’attention de ses fans avec une intensité palpable, il n’a pas seulement offert un concert, il a littéralement embarqué le public dans un tourbillon sonore, où cumbia, salsa, et influences urbaines se sont mêlées dans une explosion de couleurs et de vibrations. Le groupe doté d’une énergie folle est composé de musiciens transpirant le talent et la passion à chaque mouvement. Le chant de la frontwoman Rebecca Roger Cruz est envoûtant, une voix qui porte à la fois la chaleur de l’Amérique latine, et plus particulièrement de son Vénézuela natal, et la fougue des révolutions populaires. Elle s’adresse au public en mélangeant français et espagnol, chaque parole semblant brûler avec l’urgence de faire entendre la voix des sans-voix. C’est une claque, une expérience vivante et vibrante, en perpétuelle évolution.

 

Sarāb : entre transe, tempête et tendresse

Il est des concerts où la musique ne se contente pas de remplir l’air, elle le transforme. Sarāb – mirage en arabe – n’est pas seulement un nom, c’est une promesse. Celle d’un voyage sans visa, d’un cri poétique contre les murs du monde. Ce jeudi soir au Marché Gare, le groupe franco-syrien a électrisé une salle pleine à craquer, brassant oud, électro, jazz et colère douce dans un souffle aussi incandescent que maîtrisé.

Dès les premières notes, le chant d’Arwa Saidi, à la fois profond et céleste, transperce le silence. Sa voix, habitée, porte des textes en arabe comme on porte une mémoire : celle d’un pays éclaté, de souvenirs brûlants et de révoltes tues. À ses côtés, le tromboniste et cofondateur Julien Pontvianne installe des nappes sonores puissantes, parfois grondantes, qui donnent au set des allures de tempête retenue.

Ce concert, c’est un corps vivant. Les musiciens dialoguent, s’élancent, se heurtent, puis se retrouvent dans des explosions rythmiques qui évoquent autant le free jazz que la transe orientale. On pense à Dhafer Youssef, à Radiohead, parfois même à Björk dans cette capacité à mêler l’intime et l’universel, le brut et l’éther.

Mais Sarāb n’est pas là pour plaire : il est là pour dire. Dire l’exil, les luttes, l’identité multiple. Chaque morceau est un fragment de récit, entre rage sourde et extase mystique. Le public, lui, est suspendu. Certains ferment les yeux, d’autres dansent comme pour conjurer le réel.

Vendredi 4 avril au Périscope

 

Fred Frith & Susana Santos Silva : L’art du vertige sonore.

Une soirée d’improvisation radicale où la liberté n’était pas un slogan, mais une matière vivante.

Ils étaient deux sur scène, mais l’espace résonnait comme un orchestre en pleine déconstruction. Ce soir-là, dans une salle recueillie et attentive, Fred Frith, figure tutélaire de l’avant-garde anglo-saxonne, retrouvait Susana Santos Silva, étoile montante de l’improvisation européenne, pour un duo sans filet, sans repère, et sans concessions.

Frith, égal à lui-même, tord les limites de sa guitare préparée comme un alchimiste sonore. Tantôt délicat, tantôt rageur, il fait chanter le bois, grincer les cordes, vibrer l’électricité. Face à lui, la trompettiste portugaise explore les confins de l’instrument : souffle blanc, chuchotements, cris étouffés, phrases éclatées — une langue propre, singulière, jamais démonstrative.

Ce duo, né d’un goût commun pour le risque, repose sur une écoute rare. L’un amorce un geste, l’autre le prolonge ou le sabote avec élégance. Tout est mouvement, tension, relâchement. L’écriture se fait en direct, dans l’instant. Le jazz est là, mais dans son essence la plus brute : celle d’un terrain de jeu infini où tout peut surgir.

Il serait vain de parler de morceaux ou de structure. Ce que livrent Frith et Santos Silva, c’est une cartographie de l’inconnu. Une traversée libre, souvent déstabilisante, mais toujours habitée. On pense aux travaux d’Evan Parker, de Joëlle Léandre, ou encore aux grands moments du label ECM des années 70, mais sans nostalgie. Ce qui se joue ici est profondément ancré dans le présent.

Au final, c’est moins un concert qu’une expérience sensorielle. Une plongée dans une matière sonore en constante mutation, qui exige du public qu’il lâche prise. Et c’est précisément dans cette exigence que réside la beauté du geste.

Samedi 5 avril au Périscope

Tixier & Obradovic : jazz sensible, tension palpable.

Loin de la démonstration technique, le duo franco-croate explore une forme de narration musicale qui préfère les détours sensibles aux lignes droites.

Sur scène, pas de bavardages. L’essentiel passe par la musique, ses creux, ses surgissements. Tixier, pianiste au toucher précis, souvent aux frontières du minimalisme, module les atmosphères avec une économie élégante. Il joue aussi du silence, et de cette tension fragile qui le précède. En face, Lada Obradovic détourne sa batterie des automatismes du rythme. Elle en fait un instrument poétique, textural, parfois bruitiste, mais toujours au service d’une dynamique intérieure. On ne sort pas de ce concert avec une mélodie en tête. Mais avec la sensation rare d’avoir assisté à une conversation artistique sincère, portée par deux musiciens qui n’ont pas peur de l’inconfort,ni du mystère.

 

Y-Otis:  Du jazz Organique, mystique et éclectique!

D’emblée l’énergie du trio s’impose, mené de main de maitre par le fabuleux saxophoniste suédois Otis Sandsjö. Très actif sur la scène jazz européenne depuis une dizaine d’années, il vit aujourd’hui à Berlin et multiplie les projets audacieux. Et de l’audace , il n’en manque pas, avec son « liquid jazz », une mosaïque sonore unique, une fusion innovante de jazz, d’électronique et de hip-hop. Propulsée par des beats ultra efficaces et le jeu élastique du ténor,  leur musique est vibratoire, entre jazz-rock psychédélique, bidouillages électro et énergie hip-hop (les beats de Tilo Weber à la batterie et les bidouillages électro de Petter Eldh  sont terriblement efficaces). Otis ( numéro un mondial de l’ascenseur), vous l’avez compris c’est tout sauf de la musique d’ascenseur!!

 

 

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