Le rôle d’un Festival n’est pas seulement de programmer des valeurs sûres, mais aussi de promouvoir les nouveaux talents. Tel fut le rôle dévolu à la soirée du vendredi 8 juillet consacrée à la « New Generation » qui n’a attiré « que » 2 000 festivaliers au théâtre antique de Vienne. Certes les trois affiches de la soirées n’étaient pas les plus connues du monde, mais ça ne devrait pas tarder en ce qui concerne du moins l’étintelante saxophoniste Nubya Garcia qui fit forte impression et un Robert Glasper d’une époustouflante précision.
Le Blue Lab Beats est l’une des formations actuellement en vogue au sein de la jeune scène londonienne. Il eut pour rôle d’ouvrir la soirée.
Le duo à l’origine du groupe, en l’occurrence le claviériste aux cheveux bleus, NK-OK (Namali Kwaten) et le guitariste Mr. DM (David Mrakpor), pratique un jazz électronique à base d’improvisations et de samples, influencé par le hip-hop, la jungle et le trip-hop. Un jazz expérimental, au-delà des genres établis, souvent pratiqué en studio, mais aussi qui s’affiche sur scène avec décontraction et à chaque fois avec des invités de qualité, comme ce fut le cas ce soir là. Une belle entrée en matière de 45 minutes chrono lors de cette soirée découverte.
Line up-Namali Kwaten – Clavier électronique ; David Mrakpor – Guitare + guests.
Passionnante et talentueuse Nubya Garcia
Ce fut sans doute la plus belle découverte de la soirée : toute de rouge vêtue, lunettes comprises, l’irruption ensuite sur la scène du théâtre antique de la saxophoniste britannique Nubya Garcia, issue, elle aussi, de la jeune scène londonienne se révéla un moment intense.
On sent d’entrée les influences de la musicienne révélée dès son premier opus « Source » sont particulièrement variées, aussi bien géographiquement que musicalement. Elle s’inspire de la scène jazz londonienne, mais encore des mélodies et rythmes vénézuéliens, guyanais, colombiens… : un fort riche melting pot.
Passée notamment par le fameux Berklee College, le Harvard du jazz, déjà auréolée d’une kyrielle de distinctions, elle possède une technique époustouflante, mise au service d’une forte imagination et une créativité musicale qui transporte l’auditeur dans un au-delà que l’on a peine à quitter. Là encore, 45 minutes chrono sur scène : beaucoup trop court pour découvrir toutes les facettes de cette saxophoniste passionnante, complexe et talentueuse que l’on espère revoir sur un plus long set à Jazz à Vienne.
Glasper : puissance et douceur
Pour clore cette soirée, Robert Glasper et ses acolytes nous ont ébloui de leur talent tout en décontraction et douceur voire nonchalance mais quelle puissance de jeu et richesse dans leurs références musicales !
Ça démarre en trombe avec des samples inspirés de DJ Jahi Sundance qui installe un climat teinté de groove et d’intensité rythmique pour la suite de la performance de haut vol qui attend le public viennois. Une introduction inspirée avec pour final la quasi-totalité de give me the night de George Benson.
Pour cette performance Musicale, Robert Glasper nous a proposé une large palette de références musicales, hybrides musicaux tirés de son propre répertoire et piochés dans ceux des compositeurs qu’il admire ( Tear for Fears, Michael Jackson, Funkadelic,…), entremêlés ensemble pour créer au final une longue et quasi incessante performance.
Le voir ainsi assimiler le jazz au rap, à la soul , à la R&B et puis à nouveau au jazz est lumineux et vertigineux. Et pour ce faire, il a pu compter sur l’exceptionnel talent du batteur Chris Dave, auteur d’une prestation incarnée et puissante, lui qui, quelques années auparavant rendait la pareille à Kenny Garrett. Précis, incisif et doté d’une technique exceptionnelle, il a été le liant de ce voyage entre soul, funk, hip hop et la fusion de tous ces styles avec le jazz.
Un concert tout en douceur, quelque peu anarchique dans le tempo, mais consistant et harmonieux du début jusqu’à la fin. Robert Glasper, c’est la force tranquille !
Line-up-Robert Glasper – Clavier ; Burniss Travis – Basse ; Chris Dave – Batterie ; Jahi Sundance – DJ