Une soirée réussie en effet et placée sous le signe du plaisir des sens: le goût d’abord, avec un apéro-dinatoire version terroir, l’ouïe ensuite, avec le jazz cinématographique de Kartel et la vue pour finir, avec un amour Noir qui finit Malle.
Kartel, quel art !
Kartel, c’est Baptiste Bailly au piano, Francis Decroix à la batterie, Matthieu Notargiacomo aux saxophones et Julien Sarazin à la contrebasse. Ces quatre musiciens ligériens ont, durant un set d’une heure environ, fait une démonstration de l’étendue de leurs talents, naviguant au cours du concert entre Jazz, Blues, Rock et musique classique. Ils ont su happer le public dans leur musique et faire oublier la salle de cinéma qui les entouraient.
Kartel maîtrise bien sa musique, à les écouter on pense aux quartets de Giovanni Mirabassi ou à celui des frères Moutin, et c’est bon signe! Il y a entre les musiciens une belle cohésion, qualité essentielle quand on joue une musique aussi dense que la leur, où l’écrit et l’improvisé s’entrecroise constamment. Les artistes qualifient eux-mêmes leur musique de Jazz cinématographique. Tour à tour délicate, sauvage, suave, extatique, elle se développe dans une succession d’ambiance savamment orchestrée qui fait effectivement penser au cinéma.
Outre la qualité d’ensemble du groupe, j’ai apprécié chacun des musiciens individuellement. Le saxophoniste, au soprano très chantant, possède un son d’une douceur rare pour son instrument. Le batteur développe un jeu touffu, un peu à la Tony Williams, toujours à l’affût et en soutien de ses camarades. Quant au contrebassiste, aussi à l’aise aux doigts qu’à l’archet, son jeu est puissant et très intriqué avec le pianiste. Celui-ci, un peu le grand architecte du groupe, semble influencé aussi bien par le Jazz que par la musique classique, d’où certains passages qui m’ont fait penser à Brad Mehldau.
Il n’y a que Malle qui m’aille
Comme par un effet miroir, au jazz cinématographique de Kartel a succédé le cinéma jazzique de Malle. Ce film, aux personnages torturés, présente une histoire d’amour qui finit mal, soutenu par l’élégante bande son de Miles Davis. Je ne me lancerai pas dans une critique de ce classique du cinéma français, quasiment 60 ans après sa réalisation ça n’aurait pas grand intérêt. Je tiens cependant à dire que j’ai particulièrement apprécié la succession du concert et du film, c’est une très bonne combinaison que j’ai hâte de renouveler.
(*) 8 rue de la Valse