Au coeur de l’hiver, aussi chaud soit-il, il faut savoir se faire des petits plaisirs pour garder le moral. Et bien à Saint-Etienne, nous avons les Jazzeries d’Hiver (27 janvier – 11 février), organisée par l’incontournable Gaga Jazz.
Régulièrement en partenariat avec la salle Le FIL, cette association propose depuis des années des concerts Jazz de qualité sur Saint-Etienne et participe grandement à la survie du Jazz dans la région.
En ce jeudi 28 janvier, les Jazzeries d’Hiver 2016 commencent bien avec les deux excellent groupes de la soirée!
Herbie and (new) bee
Un combo d’élèves du CRR Massenet, les HerbieVores (j’improvise l’orthographe à vrai dire), ouvre le bal. Bien calé entre le bar et la scène, je vois débarquer cinq lycéens (clavier, guitare, basse, batterie et sax). Naïf que je suis, je me dit que ça va commencer en douceur.
Bah tiens, même pas le temps d’entamer une mousse, vlan le coup de bambou. Ils sont pas là pour rigoler les gars. Un hommage à Herbie Hancock, période Head Hunters, à seize ans, il faut oser!
Et je dirais qu’ils ont les moyens de leurs prétentions. Au programme quatre titres, Watermelon Man / Palm Grease / Butterfly / Actual Proof, tous bien maitrisés malgré leur complexité. On retrouve bien l’ambiance de l’époque avec un Rhodes tout en nappes éthérés, une basse ronde et puissante, des cocottes funky et un sax tirant sur Macéo en plus Jazz.
Le plaisir est au rendez-vous et cette belle prestation laisse augurer que les jeunes pousses d’HerbieVores n’en resteront pas là!
Welcome to the dark side!
Après une première partie plutôt festive, le moins que l’on puisse dire c’est que je ne suis pas préparé aux ténèbres musicales de Tilt (tin tin tin …).
Tilt est une toute nouvelle formation, avec Joce Mienniel (flûte et clavier), Guillaume Magne (Guitare), Sébastien Brun (Batterie) et Vincent Lafont (Fender Rhodes), qui joue un mélange de rock, musique électronique et Jazz, disons un peu … sombre.
La flûte de Joce est métallique, tranchante, parfois doucereuse mais toujours tendue. Le guitariste, véritable esthète du larsen, a un gros son bien âpre et rock. Le batteur, avec ses marches militaires et ses jeux rythmiques diaboliques, pulse comme un énorme coeur. Le Rhodes, presque corrosif, s’insinue partout. Il amplifie la tension et cimente le tout.
Le groupe est une entité protéiforme d’où les sons sortent un instant avant de revenir se fondre dans la masse. La musique est organique et mécanique à la fois, elle est oppressante (la grosse caisse du batteur m’a littéralement comprimé la cage thoracique), enivrante et donne l’impression d’une marche inéluctable vers un destin funeste.
La musique de Tilt est si dense qu’on a parfois l’impression que l’air entre les musiciens devient palpable, visible. Les morceaux, joués les uns à la suite des autres, presque fusionnés en une gigantesque suite, sont parfaitement maitrisés.
Cette musique traduit fidèlement les intentions des musiciens puisque le thème est apparemment la marche des villes vers la destruction. Très évocatrice, elle nous fait naturellement penser à Ennio Morricone, à Tim Burton, à Mad Max ou à un road movie.
En somme, Tilt c’est du très bon mais disons, pour public averti.
Si vous voulez vous y préparer, l’album sera dans les bacs le 12 février. Et pour les aficionados de Joce Mienniel, vous pourrez venir l’écouter le 13 février à l’Opéra de Lyon avec entre autres Andy Emler.