Magriff
Sylvain Rifflet : saxophone ténor, shruti box, home made music box
VerneriPohjola : trompette & électronique
Philippe Gordiani : guitares
Benjamin Flament : percussions
Avec ce nouveau disque, Sylvain Rifflet se recentre sur ses passions intimes. Il en sort des ambiances feutrées mais jamais mièvres, mêlées de sonorités électroniques et électriques qui densifient son propos. Reconnaissable entre tous, le fidèle Philippe Gordiani apporte une contribution non négligeable à l’ensemble de l’album avec, notamment, cette couleur particulière qui n’appartient qu’à lui. Le trompettiste finlandais, par son discours lui aussi très original, est à même de surprendre en toute occasion. Quant à Benjamin Flament, il tient son rang et permet, avec ses collègues, au saxophoniste de développer toute l’étendue narrative de son imaginaire musical. Quelquefois répétitive, souvent déliée et souple, la musique porte les messages que Sylvain Rifflet adresse à celles et ceux qu’il aime, que ce soit des proches ou des influences musicales marquantes. Vous croiserez donc dans ce Cd Abbey Lincoln, Stan Getz ou encore James Baldwin et Steve Reich, entre autres. De quoi vous faire tendre l’oreille.
https://www.sylvainrifflet.com/
CHRISTOPHE MARGUET / DANIEL ERDMANN QUARTET . Pronto !
Mélodie en sous-sol
Daniel Erdmann : saxophone ténor
Bruno Angelini : piano
Hélène Labarrière : contrebasse
Christophe Marguet : batterie
Les gens qui s’intéressent aux paysages inventés par Ornette Coleman, Ed Blackwell, Dewey Redman et quelques autres trouveront dans ce disque de quoi nourrir leur bon goût. Mais pas que. Attention, le quartet réuni par le saxophoniste et le batteur sait faire la part des choses et créer, avant tout créer, une musique qui lui appartient en propre. Avec Bruno Angelini et Hélène Labarrière venant étendre le champ d’action de la paire initiale, c’est un voyage musical différent qui se fait jour. Articulé autour du contraste classique écriture / improvisation, l’itinérance se fonde certes sur des mélodies propices à ce jeu mais, également et plus encore, sur la richesse des couleurs sonores de chaque instrumentiste. Vous venez de lire leurs noms, alors que dire de plus ? Que c’est une incontestable réussite car ils savent tous être eux-mêmes au service du collectif, ce qui doit être noté car il arrive souvent que de fortes personnalités ajoutées les unes aux autres soient incapables de former un groupe (on en a entendu quelques uns, croyez nous). Là, pour le coup, chacun sublime les autres et la musique ne s’en porte que mieux. Du jazz comme on l’aime.
https://christophemarguet.com/
http://www.daniel-erdmann.com/
MARTA SANCHEZ . Spanish American Art Museum
Whirlwind recordings
Marta Sanchez : piano
Alex LoRe : saxophone alto
Roma Filiu : saxophone ténor
Rashaan Carter : contrebasse
Allan Mednard : batterie
Invités :
Camila Meza : guitare et chant (5)
Ambrose Akinmusire : trompette (5)
Charlotte Greve : synthés (5)
Espagnole exilée au États-Unis, Marta Sanchez, par ses compositions originales, lance dans ce disque, son quatrième, un pont entre ces deux cultures. Pianiste inspirée (c’est rien de le dire), elle ouvre dans son discours des espaces permettant à ses acolytes d’exprimer pleinement leur sensibilité. Il en découle des thèmes aux harmonies riches dans lesquelles le détail fait toujours la différence. Et c’est là que l’on entend le travail rigoureux de l’artiste et sa capacité de création. Chaque titre porte son lot de surprises sans nuire pour autant à l’axe central choisi. C’est la seconde force de cet album que d’être parfaitement homogène, tant dans l’écriture que dans l’expression musicale. De formes élaborées en boucles rythmiques, par le biais de variations multiples, Marta Sanchez insuffle à son propos une énergie vibrante malgré la complexité certaine (mais néanmoins relative) des lignes et laisse paraître une sensibilité profonde. Réalisé pendant le confinement, ce disque lui a permis de mettre en perspective de fort belle manière ses interrogations et ses ressentis. A écouter.
NEW YORK BASS QUARTET . Air
Laika-Records
Martin Wind : contrebasse
Greg August : contrebasse
Jordan Frazier : contrebasse
Sam Suggs : contrebasse
Gary Versace : piano, orgue et accordéon (2, 4, 5, 7 & 9)
Lenny White : Batterie (2 & 4)
Matt Wilson : batterie & percussions (2, 4, 5, 7 & 9)
Le coup du duo de contrebasses sur disque, on nous l’a déjà fait. Tout de suite, on pense NHOP et Sam Jones, mais ce ne sont pas les seuls. Le coup du quartet de contrebasses, nous n’avons pas souvenir de l’avoir déjà eu entre les oreilles. Bref, si Ron Carter lui-même dit que c’est un tour de force, on jette une oreille, voire deux. De facto, on y croise Bach et McCartney, Metheny et Zawinul et quelques compositions originales de Martin Wind, l’initiateur du projet. Comme playlist on a déjà vu pire. Pourtant, bien que tout soit parfaitement parfait, nous n’avons pas vraiment vibré. Mais bon, nous ne sommes pas contrebassistes et ceci explique peut-être cela. A vous de voir.
DAVID ENHCO . Family Tree
Nome
David Enhco : trompette
Thomas Enhco : piano
Florent Nisse : contrebasse
Gautier Garrigue : batterie
Cécile Roubin : violon
Sarah Dayan : violon
Guillaume Becker : alto
Lydia Shelley : violoncelle
Invités :
Michel Portal : clarinette basse
Célia Kameni : chant
Caroline Casadesus : chant
Voilà un disque où l’on mélange avec à-propos classique et jazz. Ce n’est pas une nouveauté en soi, mais cette galette est néanmoins irriguée par un nombre conséquent d’influences qui lui donnent un charme particulier. Le fait que les musiciens soient liés par des liens familiaux ou amicaux indique un choix fort de la part du trompettiste, celui de réunir un groupe avec lequel la communication sera en toute circonstance pertinente afin de porter le projet au plus haut. Le rencontre entre le quartet et le quatuor se fait sans heurt et c’est un modèle d’équilibre entre diaphanéité et densité. L’écriture est sophistiquée sans être alambiquée, limpide et jamais prétentieuse. D’un bout à l’autre du cd, l’empreinte musicale est celle d’un lyrisme poétique qui privilégie la légèreté aux fastes de la pompe. Au final, les deux esthétiques musicales à la base du projet ont trouvé la voie médiane et fédératrice qui a permis l’éclosion d’une musique originale.
LADY BLACKBIRD . Black acid soul
Fondation Music Productions limited
Lady Blackbird : voix
Deron Johnson : piano & claviers
Jon Flaughter : contrebasse
Jimmy Paxson : batterie & percussions
Chris Seefried : guitares
Troy “Trombone Shorty” Andrews : trompette
Née Marley Munroe, Lady Blackbird chante un genre de soul très habitée par l’intime. L’ensemble de l’album est travaillé à l’os. Pas de fioriture, rien qui puisse vous faire danser ou enjoliver une morne soirée hivernale. Les quelques musiciens qui l’accompagnent, pas tous en même temps, faut pas exagérer, la servent a minima sur un plateau ne manquant jamais d’un bon goût qui donne une saveur particulière à sa voix. Et quelle voix ! Une voix qui gratte, charnue, aux vibrations profondes, qu’elle utilise avec un talent impressionnant. Nous irions jusqu’à dire qu’elle ne joue pas quand elle chante. Elle n’en pas besoin. Les mots qui sortent de sa bouche ont l’épaisseur d’une âme qui paraît ne rien ignorer des douleurs de la vie. Avec en sus une musicalité intuitive remarquable, elle donne à chacun des titres de l’album une rare puissance, une forme d’aura inimitable, qui ferait fondre n’importe quel eskimo. La glace, pas l’inuit. Ceci étant, pour émerveiller une nuit triste et sombre, la musique de Lady Blackbird est un premier choix incontournable. A découvrir illico presto.