Curieusement, si le jazz a prospéré dans les banlieues de Lyon, et que plusieurs festivals ont vu le jour, il n’a jamais réussi à s’imposer à Lyon même, malgré la présence d’un véritable public, d’un tissu de musiciens professionnels et de multiples établissements où résonne en permanence cette musique
Curieux : c’est comme si en matière de jazz Lyon s’était comportée comme une cité interdite. Non pas par la fréquence des évènements, des tentatives, des concerts, des jam, et surtout de son Hot-Club qui reste en France et en Europe l’exemple même de pérennité musicale. Mais plutôt en matière de festivals, cette mise en scène festive de l’art qu’on prétend servir.
Paradoxe : le Jazz n’a cessé de fleurir depuis les années 50 à Lyon, ou du moins autour, dans ce qu’on n’appelait pas encore l’agglomération ….ou la métropole. Comme si à peu près toutes les banlieues de Lyon s’étaient réveillées successivement avec l’espoir ou la prétention de remplacer la grande absente. Tour à tour, des festivals ont ainsi vu le jour : Saint-Fons, Francheville, Villeurbanne (campus de La Doua), Vaulx-en-Velin, le Rhino, magnifique vagabond aux frontières indécises, Fareins (après tout pourquoi pas l’accueillir), et évidemment, l’étoile au firmament, Jazz à Vienne. A chacun sa couleur, son atmosphère et son histoire.
« Le principal mécène d’un festival, c’est le public », dit Jean-Paul Boutellier
Certes, aujourd’hui, certains vont mal : à Vaulx-en-Velin, où ce magnifique festival a dû céder l’estrade à des « Musiques Urbaines » une année sur deux (1). Ou à Francheville où une poignée de passionnés a décidé de poursuivre un festival supprimé à l’occasion d’un changement de mairie. Démonstration que, décidément, un festival ne doit surtout pas compter sur la puissance publique mais bien uniquement sur son public. Le mot de Jean-Paul Boutellier est à inscrire dans le marbre : « le principal mécène d’un festival, c’est le public ».
Ce qui ne rend que plus méritoire la bonne santé d’autres festivals, tels le Rhino, ou plus près de nous, ce fameux festival de La Doua (à Villeurbanne) organisé par les étudiants du campus.
Reste une inconnue : l’absence durable d’un festival de jazz à Lyon, malgré tout un tissu musical favorable, que ce soit les écoles, les musiciens professionnels, les scènes et surtout un public souvent orphelin d’évènements musicaux. Et malgré les velléités de quelques-uns dont Jean-Louis Mandon, qui officia à Francheville avant de tenter de lancer un festival à partir du Hot-Club, et de Gérard Vidon, qui n’a cessé de dynamiser le fameux caveau.
Le regretté festival du Péristyle de l’Opéra de Lyon
Dans ce désert, on n’oubliera tout de même pas les deux festivals qui ont pourtant eu leur heure de gloire à Lyon : le festival du Hot-Club, même s’il n’a jamais pris véritablement son envol, et celui du Péristyle de l’Opéra de Lyon. Durant plus de deux mois, de mi-juin à début septembre, ce Péristyle offrait dans un Lyon déserté une vitrine unique du jazz lyonnais et régional. Chaque jour sauf le dimanche, trois sets de 45 minutes. L’été était sauvé. Aux commandes François Postaire. Pour tous les aficionados de musique improvisée, son départ signa bien une forme d’enterrement de ces pérégrinations musicales qui s’étalaient à l’Amphi tout au long de l’année. On ne sait d’ailleurs toujours pas aujourd’hui, pourquoi il fut décidé de rayer d’un trait de plume une si belle entreprise.
Bref, un festival à Lyon ? Un joli défi.
(1) Récemment questionnée, la mairie de Vaulx-en-Velin nous a précisé il y a quelques jours à propos d’A Vaux Jazz que le festival n’était pas supprimée mais qu’il faisait l’objet d’une « réflexion »….depuis 2019, date de la dernière édition. On est prié de ne pas rire, même si on a une pensée pour Gilbert Chambouvet et Thierry Serrano, les deux directeurs successifs d’A Vaulx Jazz.?