Durant un mois, ce festival né au tournant du siècle, impose une vision du jazz actuel particulière mais réussie : si Marcus Miller, Samara Joy, Diane Reeves et Brad Mehldau jouent les points de repère, bien d’autres viennent ici ouvrir leurs propres pistes en entraînant un public attentionné
Marseille Jazz des Cinq Continents, né au tournant du siècle et qui fête donc ce soir ses 23 ans, a quelque chose de particulier. Evidemment. Dans le genre festival ambitieux plongé au coeur d’une métropole, il est quasiment unique.
Durant un mois, il emmène cette ville inédite à la découverte de sons et de musiques d’ici et d’ailleurs, inventant un séduisant cocktail qui puise en effet dans tous les continents.
Si Brad Mehldau, Marcus Miller et la grande Dianne Reeves serviront de phares authentiques, si Gilberto Gil en grande formation (et en famille) remettra la cité phocéenne à l’heure brésilienne, ce festival ambitionne autre chose qui se lit autant dans sa programmation que dans les sites successifs intra muros où il compte séjourner jusqu’à la fin du mois : d’une abbaye au Mucem ou des jardins du Palais Longchamp à un joli théâtre en plein air. Des décors taillés sur mesure en fonction des artistes ou des groupes invités. « J’essaie de construire une visite, un peu comme une visite d’exposition, explique Hugues Kieffer le directeur, pour arriver ainsi à un panorama inédit et éphémère comme seule la musique sait en créer.
Il s’agit juste de trouver les liens et les lieux où l’artiste retrouve son public, où ils se rencontrent ».
Et si Yaron Herman, Samara Joy, Dhafer Youssef, Ballaké Sissoko et Selah Sue ponctueront quelques unes des soirées repérées de l’édition, si le pianiste Koki Nakano, Alfa Mist et Gabi Hartmann signeront également à leur façon l’édition, le festival s’enorgueillit aussi de ces deux créations qui ouvrent le festival : celle emmenée par Clélya Abraham, Sintia Piccin, Ana Karina Sebastião et Ananda Brandão – en complicité avec Jazz à Vienne, et celle de Lamine Diagne et Matthieu Verdeil (Kay, Lettre à un poète disparu).
Il en sera de même avec Benjamin Lackner (en quartet) qu’ECM a pris sous son aile (escorté de Manu Katché et du délicat contrebassiste Jérôme Regard), ou du Kahil El’Zabar Quartet qui entoure le saxophoniste de Chicago Isiah Collier. « Il n’y a pas de jazz obsolète ni de jazz précurseur, c’est ça qui me plaît, c’est vivant », souligne au passage Hugues Kieffer, « fier » de voir le festival s’ouvrir à ces créations.
Tout cela débouchera sur un final emmené par Raphaël Imbert mais auparavant, ces Cinq Continents seront venus à bout d’une soirée unique réunissant Emile Londonien (à quatre têtes), Nubya Garcia et Michael Leonhart Orchestra.
L’occasion de mieux saisir comment et pourquoi le jazz n’en finit pas d’irriguer, de transporter et d’inspirer…