Les Nuits de Fourvière sont financées pour une bonne part par le Conseil Général du Rhône qui va disparaître, du moins sur le territoire de l’actuel Grand Lyon pour donner lieu à la Métropole. Quelles conséquences ce bouleversement pour cette manifestation lyonnaise ?
Dominique Delorme-Comme vous le savez, le 1er janvier 2015, sur le territoire des 58 communes représentant le Grand Lyon, la communautauté urbaine disparaît. Une collectivité nouvelle, qui n’existe pas, va voir le jour, qui s’appelle la Métropole. Elle aura ses élus, son président. Cette Métropole va absorber les compétences du Conseil Général sur son territoire.
Aujourd’ hui nous sommes subventionnés par le Conseil Général du Rhône, mais nous sommes installés sur le territoire de la Métropole. Il est donc prévu que notre EPIC, en l’occurrence l’Etablissement Public à caractère Industriel et Commercial qui gère les Nuits de Fourvière soit transféré à la Métropole au même titre que les pompiers, par exemple.
Redoutez-vous des conséquences, notamment au point de vue pécuniaire ?
Il y a quinze jours, nous ne savions pas qui serait élu. Il était donc impossible de négocier avec quiconque.
Depuis quinze jours, nous savons qui sera le président de la Métropole et qui seront les conseillers métropolitains. Vous imaginez bien qu’ils ont d’autres problèmes à résoudre avant de se pencher sur les Nuits de Fourvière.
Il va falloir d’abord qu’ils fusionnent divers services le 31 janvier 2015, que la Métropole soit capable de sortir les paies de 9 000 fonctionnaires, soit l’addition des 4 500 fonctionnaires de la Métropole et des 4 500 du Conseil Général, sachant qu’ils n’ont pas les mêmes régimes indemnitaires. Ensuite, il faudra qu’ils s’occupent des questions régaliennes, les pompiers, service départemental : fait-on deux services ou un seul , etc.?
Qu’attendent les Nuits de Fourvière du nouveau cadre métropolitain ?
D’abord, les Nuits de Fourvière sont nées de la ville de Lyon. C’est Edouard Herriot qui les a créées. De 1946 à 1990 c’était ville de Lyon. Puis, en 1990, il y a eu une réorganisation. La ville et le département ont voulu simplifier les liens, car il existait des croisements : une répartition a été mise en place.
Il a été décidé par exemple que le musée gallo-romain passait au département. Il se trouve que le Festival était basé dans le parc du musée gallo-romain. C’est ce qui explique qu’on soit passé au département et qu’on ne soit subventionné que par lui parce qu’il s’agissait d’un choix de répartition et de simplification. Il s’agit donc d’une forme de retour, mais pas tout à fait dans la même collectivité.
Au cours des vingt dernières années, et surtout les douze dernières, le Département a été une tutelle particulièrement attentive à l’idée du développement du festival.
C’est donc le Département qui est à l’origine de l’important développement du Festival.. ?
Il a effectivement souhaité son développement pour en faire une institution forte. On lui en sait gré de cela.
Quand le festival a été repris il y a vingt ans, il était quelque peu en déshérence. Le Département a redressé le festival, notamment ces dix dernières années en créant l’établissement public, l’EPIC.
Nous arrivons au sein de la Métropole avec cette maturité.
Les Nuits de Fourvière font partie des trois festivals les plus fréquentés de France toutes catégories confondues et dont les productions et créations sont emmenées en tournées pendant l’année, partout dans le monde.
Il apporte donc un rayonnement international à la Ville grâce aux plus grandes stars du monde entier qui viennent sur ce plateau, que ce soit dans le domaine du théâtre, de la musique ou de la danse.
Tel est aujourd’hui le positionnement de ce festival. Le public a été multiplié par trois avec un peu plus de 150 000 spectateurs.
Que pourrait vous apporter votre intégration au sein de la future Métropole ?
Qu’est-ce qui va être formidable avec la Métropole ? La seule chose qui nous manque c’est une coordination dans la communication et les autres évènements qui se déroulent dans l’agglomération lyonnaise. Il existe des évènements qui dépendent de la Ville de Lyon, d’autres, du Grand Lyon ou du Conseil général. Cette fois, d’un seul coup, l’ensemble de ces évènements sera porté par une seule collectivité et nous pourrons les défendre tous ensemble.
Cela donnera encore plus de visibilité à tout le monde. Je suis persuadé que ce sera gage et facteur de développement.
Quid du financement des Nuits de Fourvière ?
Il existe un festival qui commence le 3 juin et qui se termine le 2 août.
Il propose 60 spectacles et 180 représentations. D’abord, il y a la subvention du Conseil Général qui est de 3,5 millions d’euros. Je me suis toujours dit que cette subvention, il fallait la faire fructifier. Pourquoi bénéficie-t-on de cette subvention ? Parce que nous sommes un service public de la culture. Qu’est-ce à dire ? Que nous faisons ce que le marché ne sait pas faire. Ce que le marché sait faire, on n’a pas besoin de le faire.
Je m’appuie sur ces événements extrêmement médiatiques pour développer des recettes. Un établissement public n’a pas d’actionnaires, ne distribue pas de dividendes.
Ce que nous faisons donc, c’est de dégager des excédents sur certains spectacles pour essayer d’amplifier l’effet de la subvention et ensuite, mettre en place des spectacles que le marché ne peut pas inventer.
Aujourd’hui, avec 3,5 millions de subvention, j’arrive à faire naître presque 2 millions de mécénat et 5 millions de billetterie, ce qui fait environ 10,5 millions. Quand je suis arrivé en 2003, la subvention représentait 3,5 millions et les recettes propres 1,5 million.
Aujourd’hui, la subvention est toujours de 3,5 millions et les recettes propres sont passées à 7 millions. Voilà. Le public était composé de 65 000 spectateurs ; l’année dernière, de 157 000.
Les Nuits de Fourvière pourraient-elles monter des spectacles en cours d’année, comme a tendance à le faire de plus en plus Jazz à Vienne, par exemple ?
Non. Ce serait une fiction. L’argent public n’a pas les moyens de le développer et puis je ne vois pas pourquoi j’irais organiser des concerts au Transbordeur, des spectacles à la Maison de la Danse ou à l’Auditorium puisqu’ils le font déjà et très bien.
Je n’ai pas envie d’user nos moyens. Il y a aussi autre chose ; il suffit de prendre l’enchaînement des évènements culturels entre avril et décembre : Quais du Polar, les Assises internationales du roman, les Nuits Sonores, les Nuits de Fourvière, la Biennale de la Danse, le festival Lumière, Tout le monde dehors, le 8 décembre. Il faut y ajouter, tout au long de l’année, l’Opéra, la Maison de la Danse, le Théâtre des Célestins, le Théâtre de la Croix-Rousse, le TNP, l’Auditorium qui ont leur identité et qui font des spectacles…
Nous avons une temporalité qui est juin-juillet, nous avons un lieu de rattachement. Il n’y aurait pas tellement de sens de faire des Nuits de Fourvière à un moment où les théâtres romains sont fermés.
Après, nous faisons comme Aix avec l’Académie, Ambronay avec l’Académie : les spectacles que nous produisons, nous les faisons tourner : récemment, nous étions à Brisbane en Australie, puis nous serons à Melbourne, à Düsseldorf. Tout au long de l’année nous avons une activité de tournées des spectacles que nous avons montés. Hors de Lyon.