Le festival doit faire face à un déficit de recettes inquiétant alors que la pandémie l’a déjà fragilisé. Des annulations ou des baisses de dotations sont d’ailleurs arrivées sans prévenir, obligeant ses organisateurs à supprimer plusieurs de ces concerts gratuits organisés dans de petits villages des Baronnies, un des charmes de l’évènement. Plusieurs solutions se profilent pour passer le cap et le mettre à l’abri de ce genre de déconvenues. Mais l’équation n’est pas simple
Parfum de Jazz qui fête actuellement sa 23ème édition n’avait pas besoin de ça. Alors que comme tous les autres festivals, il est en train de se remettre de deux années difficiles dues à la pandémie (annulation, perte de clientèle, réticence généralisée à fréquenter les lieux publics) et qu’il compte sur l’édition en cours pour se remettre définitivement sur les rails, voilà qu’il doit affronter une baisse de financements qui complique sacrément la tâche de ses organisateurs.
Ce festival dont la particularité est de porter la culture loin dans des communes ou dans des territoires à l’écart des grands itinéraires doit compter, pour être à l’équilibre, sur des financements que sa billetterie est incapable de lui apporter. Il n’est pas le seul dans ce cas et tel est le pain quotidien d’ailleurs de tous ceux qui tentent en effet ici et là de dynamiser des villages oubliés ou à l’écart.
Ainsi ce Parfum de Jazz qui, au-delà de Buis-les-Baronnies, de Pierrelatte et autre Saint-Paul-Trois-Châteaux, s’entête à faire aimer le jazz dans des communes insoupçonnées, le plus souvent avec la complicité active de leurs élus (exemple Mollans-sur-Ouvèze).
Le calcul est vite fait. En matière de budget, ce festival itinérant du sud de la Drôme, est un exemple d’argent bien employé : 200 000 euros au total (cachets des artistes compris) pour près de deux semaines de festival comprenant concerts du soir comme ceux organisés en matinée ou en après-midi, lesquels sont gratuits et en accès libre.
Sur ce total, la billetterie représente peu ou prou 60 000 euros, via des prix d’entrée somme toute modiques. Reste donc à réunir quelque 140 000 euros pour faire vivre ce festival qui peut compter sur une armée de bénévoles ou de personnes dévouées pour assurer son fonctionnement.
Des annulations de subsides problématiques
Or, coup sur coup, le festival a été confrontée à des baisses, voire des annulations de subsides problématiques. C’est d’abord le Centre National de la Musique qui a supprimé une aide de 25 000 euros, sans qu’on sache d’ailleurs vraiment pourquoi. « On n’en savait rien et on avait donc budgété ces 25 000 euros », explique Alain Brunet président de Parfum de Jazz.
C’est ensuite la Région Auvergne-Rhône-Alpes, qui a revu à la baisse (de 15%) sa dotation (environ 8 000 euros cette année). Le département de la Drôme a, quant à lui, maintenu sa dotation (également 8 000 euros). La ville de Buis-les-Baronnies apporte quant à elle 5 500 euros et une aide logistique et technique à souligner (prêt du théâtre de Verdure etc…) mais il ne faut pas être grand clerc pour percevoir chez elle une baisse d’implication dans un évènement qui pourtant lui profite directement (4 concerts organisés en pleine saison touristique, on ne peut pas rêver mieux).
A l’inverse, les communes du Tricastin, où se déroule la deuxième semaine du festival, s’impliquent plus : Saint-Paul-Trois-Châteaux qui accueille deux concerts a mis 12 000 euros sur la table et Pierrelatte, qui accueille les deux suivants, 15 000 euros. Les petites communes qui recevaient un concert en journée ont pour leur part joué le jeu en dotant à chaque fois le festival de 1 000 euros.
Perte de recettes attendue : 53 000 euros
Côté Spedidam, le festival a reçu cette année 10 000 euros (contre 18 000 euros précédemment). D’où le constat : « on part cette année avec 33 000 euros dans le nez » résume Alain Brunet, sachant que les entrées payantes ont baissé l’an dernier de 35% par rapport à 2019, année de référence. Ce qui représenterait une perte de 20 000 euros et donc un total de recettes perdues de 53 000 euros. Enfin, l’effort des partenaires-sponsors a baissé de moitié entre 2019 et 2022 (de 20 000 à 10 000 euros).
Sachant que le festival disposait d’environ 25 000 euros de réserve, il se retrouve confronté à une situation de plus en plus délicate, sauf à annuler comme il a été amené à le faire cette année, certains concerts en journée de « Jazz au Village » pour alléger sa trésorerie. « Le département et la Région nous apporte 15 000 euros, explique Alain Brunet, il nous faudrait au moins le double pour pouvoir gérer Jazz au Village.
Vers une réorientation du festival et de sa 24ème édition ?
Pour toutes ces raisons, Parfum de Jazz est donc dans une situation difficile, voire en danger.
Ses organisateurs multiplient actuellement les rencontres et évoquent différentes pistes propres à sortir de l’ornière : plusieurs villes ou communes seraient tentées pour être plus présentes (en accueillant ou en multipliant le nombre de concerts organisés dans leurs murs).
Quelques noms ou quelques sites sont déjà ouvertement évoqués. A tout le moins on peut donc s’attendre à ce que la physionomie de la 24ème édition présente quelques différences avec celle qui se termine en fin de semaine…
Photo : Alain Brunet, président de Parfum de Jazz