Cette 21ème édition est une édition de retrouvailles : entre artistes et public, à Marseille comme dans tous les lieux visités, des Saintes-Maries de la Mer à des petites communes provençales qui n’en attendaient pas tant
Au festival des Cinq Continents de Marseille, il y a évidemment les incontournables, de Herbie Hancock à Diana Krall, de Stacey Kent à Rhoda Scott, les familiers, de Céline Bonacina à Robin McKelle, de Portico Quartet à Anne Paceo, de Tigran Hamasyan à Magma, les inattendus, Edouard Ferlet, Nicolas Folmer, Sylvain Rifflet, les attendus, Pierrick Pedron, Charley Rose Trio, et puis les trouvailles dont Nduduzo Makhathini qui pourrait illustrer à lui seul la démarche de ce festival qui fête sa 21ème édition.
Un festival qui démarre gentiment à fin avril, monte dans les tours au mois de juin et passe la 4ème du 7 au 23 juillet, avant de doucement ralentir pour stopper début août.
Un festival multiple, d’abord par sa façon d’irriguer son « territoire » : non content de multiplier les concerts sur cinq scènes différentes à Marseille même, l’évènement se promène bien au-delà, des Saintes-Maries de la Mer à Eygalières, de Salon-de-Provence (avec Randy Brecker en personne) à Joucques en passant par Cornillon-Confoux. A chaque plateau, à chaque scène, une approche inédite et la volonté de mettre en adéquation public, lieu et artistes invités. D’un côté, durant une quinzaine, un espace central, labellisé avec un programme facilement repérable, de l’autre, un fourmillement de rencontres, de concerts plus intimes qui se déploient dans l’ensemble des Bouches-du-Rhône sur une durée plus longue.
Axes privilégiés : la rencontre, la diversité et les tarifs pratiqués
Axes privilégiés de la petite équipe à la tête des Cinq Continents, la rencontre (des musiques, des artistes, des publics), la diversité tout en restant accessible que ce soit par les lieux ou par les tarifs pratiqués (de gratuit à 30 euros pour les concerts les plus onéreux).
Ici, pas de festival concentré sur une quinzaine comme à Marciac ou à Vienne, ni de jauges démesurées. C’est dans la cour d’école que J.P. Bimeni & The Black Belts sont attendus le 29 juillet à Cornillon-Confoux pour un concert gratuit. Parallèlement, à la différence de ces festivals qui sont seuls en piste au moment où ils se tiennent, les Cinq Continents doivent composer avec une multitude d’évènements artistiques, musicaux qui se déroulent au même moment à Marseille, à Aix et aux alentours mais pas seulement. «Il n’y a pas ici de festivaliers au sens propre comme à Marciac ou à Vienne », explique Hugues Kieffer, le directeur de l’évènement depuis 6 ans.
Reste que l’évènement accueille 25 000 spectateurs sur la partie festival, voire entre 50 000 et 60 000 personnes si l’on inclut la totalité des concerts organisés (gratuits ou non). Ici, le festival n’oublie surtout pas qu’il est d’abord financé par l’argent public (ville, métropole, département, région), la Sacem et quelques partenaires privés et que l’objectif est de rester à l’équilibre. « C’est une obligation, dit Hughes Kieffer ; il s’agit d’argent qui ne nous appartient pas mais qui appartient à tout le monde ».
Se remettre de deux ans de pandémie
A bien y regarder, le modèle de festival qui séduit le plus les Cinq Continents c’est Coutances et son Jazz sous les Pommiers : pour sa programmation certes, mais aussi pour cette façon d’associer à l’évènement tout un territoire : « c’est le meilleur festival, ils arrivent à capter l’ensemble d’une région ».
D’où peut-être aussi l’humilité et la lucidité qui inspirent l’âme des Cinq Continents : « on n’est pas Marciac ou Antibes, souligne Hugues Kieffer, mais il y a plein de choses magnifiques à faire ».
Sans doute, comme les autres, ce festival doit-il d’abord se remettre des deux années de pandémie qui, ici comme ailleurs, laissent des traces (habitudes du public, réticences diverses, nouvelles façons d’aborder la musique). Pour cela sans doute peut-il compter sur la vitalité d’une scène locale jazz très active tout en gardant à l’esprit qu’un tel festival doit « bouger » : « c’est la base, surtout à Marseille. On doit être en mouvement en permanence ; à nous de réfléchir comment reformater la rencontre entre le musicien et le public, avec évidemment l’économique au milieu ».