Ron Carter est à Vienne une nouvelle fois. En trio, contrebasse- guitare-piano. Une configuration des plus propices pour percevoir les nuances d’une contrebasse, surtout dans un théâtre antique. Et pour redécouvrir Ron Carter, qui transporte avec lui un large pan du jazz contemporain.
L’octogénaire du Michigan a en effet joué à peu près avec tout ce qui pouvait être « basso-compatible » au cours des 60 années passées. Citons en un, citons les tous ? De Georges Benson à Bill Evans, de Rollins à Miles Davis, sans compter des collaborations ponctuelles ou des incursions vers tout ce qui lui plaisait.
Allons-y pour voir : tiens, par exemple, tout dernièrement (en 2016) avec Richard Galliano, histoire de jauger ce qu’une contrebasse émérite pouvait apporter à un accordéon. De fait, le duo prend un plaisir palpable à dialoguer à partir des compositions signées de l’un et de l’autre.
On devine ainsi l’un des grands talents de Ron Carter, cette aptitude à se fondre dans tout ensemble sans y laisser son âme ou son jeu mais, au contraire, en venant lui suggérer sans cesse des pistes nouvelles. Ce qui n’exclut pas les formations qu’il emmène : dans les années 75, ce fut un superbe quartet. Depuis quelques années, il aime se promener avec le Golden Stricker trio : au piano, Donald Vega a remplacé le regretté Mulgrew Miller, vu à Vienne il y a 5 ans. Mais, Russell Malone, à la guitare, souvent aux côtés de Dianne Reeves ou de Diana Krall, est fidèle au poste et à la démarche.
Il en résulte un trio qui a beaucoup à dire et à échanger, sans plus de manières, disert au possible, Ron Carter ici ange tutélaire de deux improvisations qui courent, légères au possible, qui s’écartent, se rejoignent, se complètent, à mi-chemin de courants musicaux facilement repérables. Merci, Donald Vega.
Et Avishai Cohen ? « 1970 » …..et après ?
Que nous réserve cette fois Avishai Cohen ? Le titre du concert comme de l’ample tournée en cours est explicite : l’album « 1970 », sorti en octobre dernier, sert de trame à la soirée. Le musicien étant né cette année-là, il est facile d’en déduire qu’il souhaite parcourir les musiques qui ont marqué son quasi demi-siècle : d’où une étrange cohabitation de musiques d’horizons divers tels que le rock, les Beatles, la pop ou le moyen-Orient. Surtout, « 1970 » fait la part belle aux voix : le contrebassiste est d’ailleurs à Vienne en compagnie de quatre choristes qui mêlent leur voix à la sienne.
L’impression mitigée à l’écoute s’estompe-t-elle sur scène ? Depuis qu’il promène sa contrebasse et son grand sourire, Avishai Cohen a toujours su emmener le public à peu près là où il le voulait, quelle que soit la méthode utilisée, du jazz au chant traditionnel, du piano à la contrebasse. Le musicien sait en effet surprendre, toujours et encore.
Caméléon à ses heures, il transforme tout ce qu’il aborde, lui apporte sa touche propre, même lorsqu’il s’écarte loin de sa « base », cette contrebasse dont il joue pourtant à ravir. Cette fois, il réunit ouds, piano, contrebasse et drums côte à côte. Pour une nouvelle alchimie.
Facebook
Twitter
YouTube
LinkedIn
RSS