Initié par le percussionniste Bruno Tocanne, ce festival invite durant trois jours des formations et des artistes rares comme Alain Blesing, Julia Robin, Catherine Delaunay, Elodie Pasquer, Sophia Domancich, Pierre Perchaud ou François Corneloup
En matière de festivals de jazz, il y a les très gros, genre incontournables, aux affiches connues, installés sur leur réputation et leur histoire. Pas besoin de citer la dizaine de festivals qui de Marciac à Nancy en passant par Coutances et Vienne rythment à leur façon l’année musicale.
Mais en-dessous, ou à côté, se trouve une cohorte d’autres festivals de toutes tailles, de tous styles et dont la ligne « éditoriale » est, quand on y regarde de près, toujours unique ou originale. Parmi ceux qui marquent les esprits par leur longévité et cette volonté d’aller dénicher des musiques autres, des jazz méconnus, bien sûr le Rhino dont la 44ème édition (sic) vient de démarrer, mais aussi Cluny, Parfums de Jazz et combien d’autres.
Miser sur la créativité et sur une volonté constante de rayonner
Il en est d’autres tout aussi convaincants : parce qu’ils misent avant tout sur la créativité et sur une volonté constante d’amener musique, culture et ouverture sur le monde en tous lieux, même les plus à l’écart. Mais plus encore, loin de se fondre dans les tendances du moment, dans les courants musicaux dominants, s’appuyant sur des formations ou des artistes consacrés, ils ont pour point commun de suivre leur propre démarche, qui peut, qui est parfois déroutante à première vue.
Tel est le cas de ce « Jazz (s) à Trois Palis » qui démarre tout à l’heure. Certes, on est loin de Lyon : ce village situé à quelques kilomètres d’Angoulême coule des jours heureux en Charente et organise depuis 4 ans cet évènement musical rapide, dense et original. Il est vrai que le concepteur de « Jazz (s) à Trois Palis » n’est autre que Bruno Tocanne, batteur, percussionniste, qui anima longtemps la scène jazz lyonnaise en y insufflant précisément un regard, une démarche, une ambition autre. On ne risque pas d’oublier les soirées concoctées par Agapes à ce sujet.
Bruno Tocanne aux commandes et à l’inspiration
Ayant fait sienne la région d’Angoulême il y a quelques années, c’est tout naturellement – on peut l’imaginer en tout cas- qu’il a lancé ce festival.
A l’affiche pour démarrer de vieilles connaissances : le guitariste Alain Blesing, la flûtiste Claudie Boucau et le percussionniste Richard Hery dans ce trio Rhizome. Alain Blesing ? Un parcours hors pair, du rock au jazz dans lequel il plonge arrivé à la trentaine. Une démarche presque logique qui va l’amener à multiplier les expériences et les rencontres : celle de la chanteuse turque Senem Diyici donnant naissance via ce duo à des mélodies autres, celles évidemment avec Bruno Tocanne : on se souvient de « L’Impermanence du doute » et, bien sûr, d’ « Over the Hills », cette création née de l’oeuvre de Carla Bley et de Paul Haines que le nonet a pu jouer ces années passées dans plusieurs festivals.
Julia Robin en solo, Catherine Delaunay et Tony Hymas en duo
Durant les deux jours suivant, on ne chômera pas. Passant samedi de la contrebassiste Julia Robin en solo (autour de chansons de Joni Mitchell) à la rencontre entre Catherine Delaunay, aux clarinettes éclatantes et inspirées et Tony Hymas, le pianiste. C’est samedi soir aussi que l’on a rendez-vous avec un trio de toute beauté incluant la pianiste Sophia Domancich, la tromboniste Christiane Bopp et le percussionniste Denis Charolais. Enfin, Dimanche, se succéderont Pierre Perchaud, à la guitare solo, François Corneloup dans un exercice solo de saxophone inédit mais riche d’espoirs et, enfin le trio de Clément Janinet (violon), Elodie Pasquier (clarinette) et Bruno Ducret (violoncelle).
Bruno Tocanne : « des occasions de vivre et de partager des musiques créatives et peu médiatisées »
À ce sujet, on retiendra les mots de Bruno Tocanne au moment de lancer ce festival :
« A l’heure où une grande partie du secteur institutionnel des musiques d’aujourd’hui passe sous les fourches caudines de la sacro sainte « industrie musicale », que ce soit au Ministère de la Culture – devenu une sorte d’annexe du Ministère du commerce et de l’industrie – au Centre National de la Musique (CNM) mais également au niveau de certaines collectivités territoriales qui s’engouffrent dans cette brèche (dont la Nouvelle Aquitaine), il est devenu complexe mais de plus en plus vital de défendre d’autres formes de rencontres musicales, en tentant de revenir sur les fondamentaux…
Entre cette industrie mastodonte – maintenant également omniprésente sur le net – et ses grosses productions mondialisées et des lieux dédiés à la culture et autres festivals devenus, bien malgré eux pour la majorité, assez élitistes, artistes et public manquent cruellement de lieux conviviaux à dimension humaine permettant de réels échanges, des rencontres impromptues, des occasions de vivre et de partager des musiques créatives peu médiatisées.
La pandémie aura, entre autres, permis de se rendre compte de l’importance de ce type d’événements à dimension humaine. Ces rencontres ne peuvent bien évidemment réussir sans la participation active de musiciens de talent qui soient curieux, ouverts, généreux, sincères, créatifs et qui acceptent de se produire dans des lieux non dédiés, avec un matériel technique minimaliste (lorsque les concerts ne sont pas totalement acoustiques.)
J’ai à nouveau la chance de pouvoir vous proposer des concerts avec quelques artistes majeurs de la scène européenne et internationale qui ont accepté avec enthousiasme ce nouveau pari est réalisable grâce au soutien de certaines des collectivités locales comme GrandAngoulême, le département Charente et la mairie de Trois Palis.
Un partenariat avec la fédération de labels jazz et musiques improvisées Les Allumés du Jazz, va toujours de soi. Nos « combats », nos réflexions pour une autre façon d’aborder le partage de la musique sont les mêmes, qu’elle soit enregistrée ou sur scène… Un « rond point des Allumés du jazz » sera donc organisé pour la première fois lors de cette édition. Il s’agira d’une rencontre, de discussions, de réflexions à propos de l’image du jazz dans les médias, vaste débat qui sera animé par Philippe Allen (…) ».
Merci à toutes les personnes, les partenaires, les sites, blogs, et autres médias qui nous soutiennent d’une manière ou d’une autre. Et je suis certain que vous apprécierez à leur juste valeur tous ceux et toutes celles qui s’impliquent dans l’organisation et l’accueil.»
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