Chick Corea Herbie Hancock. Deux pianistes dont les noms collent à l’histoire du jazz du demi-siècle qui vient de s’écouler. Deux personnalités et deux carrières à ce point parallèles qui font que les jours où les deux droites se rencontrent, on crie évidemment à l’événement.
De fait c’en fut un à Fourvière vendredi soir.
Ce moment où tous deux arrivent sur scène. Décontraction. Courtoisie égale. Quelques mots simples pour dire qu’ils ne savent pas tout-à-fait ce qu’ils vont jouer. On ne les croit pas forcément mais le cœur y est.
Corea-Hancock. Pour un duo acoustique, échappé du jazz qu’ils nous distillent chacun depuis quelque 55 ans. Sur la scène de Fourvière, deux pianos de concert, tête-bêche, pour ce qui fut durant 90 minutes comme un long concerto écrit et joué à quatre mains et dont chacun prend successivement la direction, sans guère d’interruptions.
Des recoins ignorés de leur talent et de leur curiosité musicale
Ce faisant, les deux artistes nous font pénétrer dans des recoins ignorés de leur talent d’instrumentiste et nous dévoilent ces océans musicaux dans lesquels ils baignent et évoluent, au-delà des frontières qu’on leur fixe habituellement.
Il faut tendre l’oreille –plus que le regard car d’ici la scène est minuscule- pour percevoir, de l’un à l’autre des deux officiants de subtiles différences de jeu et de digressions marquées qui viennent enrichir l’œuvre jouée.
Et de fait, après un premier morceau appliqué, un autre modulé à partir de sons et de rythmes numériques, leur musique répand sur le théâtre une sorte de chape en apesanteur qui renforce cet instant d’été arrêté.
Tout y est : les contrastes, la fluidité, les emballements. Deux palettes enchevêtrées, fusionnées, sans qu’il y paraisse forcément. Quelques regrets lorsque les deux compères tirent à la ligne. Superflu.
De même, on se serait bien passé du rappel durant lequel Chick Corea et Herbie Hancock, chef de chœur d’un soir, en jouèrent avec le théâtre comme avec une chorale disciplinée, faisant chanter les uns et les autres un thème simple qu’Herbie Hancock s’amusa à progressivement complexifier. Instant de récréation comme cet autre, ce lancer de coussins qui tombait comme un cheveu sur la soupe, mettant fin d’un coup à la magie du moment.
Même prévenu, le public venu au concert, espérait-il quelques pas de côté de l’un ou de l’autre, sous la forme d’un petit retour sur des thèmes connus, vite fait, pris sur le zinc ? Dans ce cas-là, il fût déçu : à part quelques mesures d’un Cantaloupe repris par Hancock, le duo ne commit aucun écart.
Pour ceux qui préfèrent les versions jazz Herbie Hancock ne pas hésiter à revoir son concert complet au JVC Newport Jazz Festival de 1988, en trio avec Buster Williams (b) et Al Forster (dr). Ou le même festival vingt ans plus tard, en 2008, en quintet et qui montre le chemin parcouru.
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