GOLIA / SANTACRUZ / CALCAGNILE . To live and breathe
Darktree Records
Vinny Golia : saxophone soprano, piccolo
Bernard Santacruz : contrebasse
Cristiano Calcagnile : batterie
- Enregistré en public le 05 février 2017 en Italie, ce trio devait à l’origine être un quartet avec le trompettiste Bobby Bradford. Ce dernier, alors âgé de 82 ans, se désista et la tournée se fit sans lui. D’un commun accord, les trois musiciens restants décidèrent d’improviser et c’est le huitième concert des dix dates qui fait la matière de ce disque envoûtant. Le trio, fort d’une humanité exploratrice féconde, avance les oreilles grandes ouvertes vers l’inconnu en confiance. Cela se sent d’emblée. Que leur musique soit brute et agitée ou qu’elle soit apaisée, elle s’étire dans des régions que seuls arpentent les amoureux du défi, les contemplatifs actifs (ce qui n’est pas un oxymore pour le coup), ceux qui ne se satisfont pas d’être dans la moyenne, ceux qui vont de l’avant et appliquent sur les toiles qu’ils tissent des couleurs inaccoutumées, des reliefs ouvragés entre lesquels serpentent le souffle, le rythme, la rondeur ou la rugosité de sonorités qui affirment et questionnent dans le même temps. Pas une once d’ennui à l’écoute de ce disque, par ailleurs fort bien enregistré, qui va son chemin dans l’instant long, entre chatoiements circulaires souples et rudesse primale. Vivement recommandé.
KIM MYHR . Sympathetic Magic
Hubro
Kim Myhr : guitares électriques (6 & 12 cordes), orgue, basse, synthétiseurs, voix, drum machine
Hans Hulbaekmmo : batterie, percussions
Michaela Antolova : batterie, percussions
Ingar Zach : gran cassa, timpani, percussions, vibrating speakers
Adrian Myhr : basse, guitares électriques (6 & 12 cordes) additionnelles
Anja Lauvdal : orgue et synthétiseurs
Havard Volden : guitares électriques (6 & 12 cordes) additionnelles
David Stackenas : guitares électriques (6 & 12 cordes) additionnelles
Si vous jetez un œil au line-up ci-dessus, vous noterez d’entrée que les guitares électriques et les percussions sont étonnamment surreprésentées. Il restait à voir ce qu’à l’écoute nous ressentirions. De fait, ce sont les orgues de Kim Myhr qui tiennent une place prépondérante. Et c’est autour d’elles que les nappes électriques des guitares évoluent, comme les percussions d’ailleurs. Il émerge de cette somme instrumentale des courants fluides qui s’enroulent autour d’une atemporalité cosmique qui engendrent une continuité riveraine du rêve sous sa forme la plus absconse, quand tout s’avère diffus, incertain, et que la part du réel peine à s’affirmer. A tout le moins, l’ambiance de ce disque porte en son sein une originalité qui flirte allègrement avec la fantasmagorie. S’ajoutent à cela, ici et là, quelques voix floydiennes qui articulent des mélodies simples sur des rythmiques souvent obsédantes qui nous ramène vers la richesse des expériences musicales seventies qui ont bercées notre jeunesse. De temps à autre le caractère évanescent de l’ensemble sonore s’alourdit grandement, comme pour souligner le corpus idéique du compositeur. Nous nous sommes laissés happer sans effort par le travail de Kim Myhr. En un mot : surprenant.
D.MORONI / J.LUNDGAARD/ L.PEARSON . There is no greater love
Storyville
Dado Moroni : piano
Jesper Lundgaard : contrebasse
Lee Pearson : batterie
- Enregistré en public en 2016 dans le célébrissime Jazzhus Montmartre de Copenhague, le trio mené par le pianiste italien Dado Moroni, avec le vétéran Jesper Lundgaard à la contrebasse et le versatile batteur américain Lee Pearson, propose un jazz classico-classique, avec quatre quatre et tout et tout, qui s’avère être pour le moins plaisant. Le jeu du pianiste qui inclut des tournures plus contemporaines rehausse l’ensemble, histoire de signaler à tous les auditeurs que nous sommes bien au XXIème siècle. Cinq belles relectures de standards et une composition du leader, jouées avec l’énergie du live, forment un ensemble cohérent qui ne manque pas de jus. Nous aurions passé une bonne soirée entre potes au Jazzhus, à coup sûr. De là à mettre le disque sur nos étagères, c’est moins sûr. Non pas qu’il démérite, mais il y en a tant… A vous de voir.
https://fr-fr.facebook.com/dadomoroni
HORACE TAPSCOTT QUINTET . The quintet
Mr Bongo
Arthur Blythe : saxophone alto
David Bryant & Walter Savage Jr. contrebasse
Horace Tapscott : piano
Everett Brown : batterie
- Presque un demi-siècle après sa mort, Horace Tapscott ne fait plus les têtes de gondole depuis belle lurette. Les a-t-il jamais faites d’ailleurs. La sortie de cet album qui dormait dans les archives est à notre avis un bel événement qui remet un peu de lumière sur cet infatigable militant de la cause noire. Avec un casting de très haut vol, les trois titres de ce disque sont tout simplement des bijoux lumineux qui témoignent d’un jazz avant-gardiste engagé qui flirte magnifiquement avec le free jazz sans pour autant oublier de produire des mélodies imparables. La musique est dense et emplie d’une énergie qui ne cesse de grandir tout au long de l’album. Habitée en chacune de ses notes, elle traduit parfaitement dans ses envolées lyriques (et quasi spirituelles) la personnalité du pianiste : un défenseur inspiré de la cause afro-américaine, cause encore aujourd’hui d’actualité, doublé d’un musicien brillant et original qui sait utiliser toute l’envergure harmonique de son instrument. Accompagné dans cet album par des musiciens exemplaires, il donne à écouter une musique d’une profondeur impressionnante. Il serait indécent de passer à côté de cet enregistrement heureusement sorti des limbes de l’oubli.
https://en.wikipedia.org/wiki/Horac…
MANU LE PRINCE . Children inthe night
Frémeaux associés
Manu Le Prince : chant, piano, percussions
Irving Acao : saxophone
Leonardo Montana : piano
Felipe Cabrera : contrebasse
Lukmil Perez : batterie
plus quelques invités
- Hommage à Wayne Shorter (qui a adoubé le travail de la chanteuse pour l’occasion), le nouveau disque de Manu Le Prince, si tant est qu’il soit fidèle au légendaire saxophoniste, sait s’en démarquer et avancer sur des territoires plus personnels et relatifs au parcours de la chanteuse. De cette balance entre ces deux pôles nait l’équilibre qui caractérise cet enregistrement. Sur une musique sans fard, la voix de Manu Le Prince pose son grain et les paroles qu’elle a composées. Chacun des musiciens donne sa ligne au profit d’un ensemble tout à fait harmonieux. Les titres défilent en souplesse et l’on pourrait même penser que le groupe les joue depuis longtemps car ils sont pétris d’une belle empathie. Entre jazz et racines brésiliennes bien mêlés, le propos ne manque jamais de saveur et ne déçoit pas l’oreille qui l’écoute.
SARAH BERNSTEIN . Veer quartet
New Focus Recordings
Sarah Bernstein : violon, composition
Sana Nagano : violon
Leonor Falcon : alto
Nick Jozwiak : violoncelle
- Un quatuor à cordes dans une vitrine de Culture Jazz ? Pourquoi pas. Les compositions de Sarah Bernstein appartiennent à notre monde contemporain. Elles en ont tous les atours et tous les attraits. Improvisatrice reconnue, également chanteuse et poète, la violoniste qui mène ce quartet a depuis bien longtemps effacé les frontières entre la musique de chambre et le jazz improvisé dans son expression la plus rude. Dans cet enregistrement de 2019, elle met en scène des histoires qui, toutes, racontent par la mélodie et le débordement ce qui est peut-être la complexité d’une époque. Ses compositions baignent dans une stylistique ouverte qui privilégie la méticulosité et poussent le quatuor vers une forme de densité musicale au sein de laquelle l’énergie et la dynamique nous ont parus très jazz. Aussi, la quatuor possède cette particularité d’être utilisé, ici et là, comme un orchestre avec une rythmique et deux électrons plus libres qu’ils ne le seraient dans une formation classique. Au final, l’on écoute une musique au charme insidieux, quasi manipulatrice, qui construit habilement un pont entre les genres musicaux. Well done.
http://sarahbernstein.com/
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