MIGUEL ZENON & LUIS PERDOMO . El arte del bolero 2
Miel music
Miguel Zenon : saxophone alto
luis Perdomo : piano
Le premier enregistrement de ce duo autour d’El Arte Del Bolero nous avait paru magique. Ce second volume, issu d’une seconde session plus réfléchie que la première qui s’était faite sur un coup de tête, ne l’est pas moins. Des trésors de sensibilité à fleur de peau, voilà ce que sont ces sept titres. Celui qui ne se laisse pas happer par ces mélodies latino-américaines est à notre humble avis complètement sourd. Au-delà de leur virtuosité totalement maîtrisée, les deux artistes, dans un dialogue fécond, privilégie l’émotion. Toutes de sinuosité inspirée, leur lecture des standards d’Amérique du Sud est un régal absolu. Si le titre « L’art du boléro » est une évidence, il l’est d’autant plus que Miguel Zenon et Luis Perdomo pratiquent l’art du duo à un niveau stratosphérique. Aucune mélodie ne leur résiste et tout dans leur interprétation semble naturel ; nous parlons là de l’alchimie qui lie les deux musiciens et leur permet des improvisations magistrales sur des thèmes connus mais totalement renouvelés dans ce Cd. Indispensable.
FIONA GROND . Poesias
Act
Fiona Grond : chant
Moritz Stahl : saxophone
Philipp Schiepek : guitare
Fiona Grond est une jeune chanteuse suisse allemande qui, avec ce deuxième disque, prend un bel envol. Sur un mode intimiste et dans un genre inclassable, elle et ces deux accompagnateurs, délivre un moment musical, fait de douceur et d’intériorité, exprimé avec une indubitable sensibilité. La conversation que la chanteuse mène avec ses musiciens prend des tours qui vont de l’obsédant au chaleureux, de la transparence à la profondeur. Quelques surprises auditives surviennent ici et là ; on entend par exemple sur un titre des brides de folklore régional. Un titre offre plus de densité et d’âpreté (et nous avons pensé à PJ Harvey, ne nous demandez pas pourquoi). La voix, avec une articulation claire et précise, toute en modulations pertinentes et inspirées donne à ces textes l’écrin car, outre son talent de musicienne, Fiona Grond possède un réel talent d’écriture. L’atmosphère générale du disque possède un charme mystérieux qui tend peut-être vers une forme douce de mysticisme. Une chose est sûre et certaine, le trio propose à l’auditeur un voyage, une calme déambulation dans un espace suspendu, loin de toute contingence. Laissez-vous porter par cet univers original, vous ne le regretterez pas.
BAPTISTE TROTIGNON . Brexit Music
Naïve
Baptiste Trotignon : piano
Matt Penman : contrebasse
Greg Hutchinson : batterie
Comme il dit dans les notes d’intention du disque, ce n’est pas un album politique. Heureusement ! Et donc, Baptiste Trotignon s’attaque à la pop music anglaise en interprétant à sa sauce quelques chansons iconiques des seventies écrites par les plus grands. Contrairement à d’autres jazzmen ayant eu à cœur de « jazzifier » entièrement leurs reprises, le pianiste ne sacrifie pas les mélodies, ce qui ne l’empêche aucunement de digresser à l’envi avec la science pianistique qui est la sienne. Accompagné par une rythmique de luxe, il donne à écouter une musique chaleureuse, enjouée et percutante. Les trois compères ont visiblement pris grand plaisir à la jouer et, comme ce sont des instrumentistes hors pairs, ils ont réussi à instiller dans cette musique la finesse propre au jazz sans jamais sacrifier l’animalité de la pop sur l’autel de la bienséance et du conformisme. Laissez-vous tenter par un disque réjouissant, empli d’une énergie positive, en parfait désaccord avec notre époque.
https://www.baptistetrotignon.com/
VELVET REVOLUTION . Message in a bubble
– sortie le 8 septembre
BMC
Daniel Erdmann : saxophone ténor
Théo Ceccaldi : violon
Jim Hart : vibraphone
Troisième album du trio après une décennie d’existence, Message in a bubble (référence à peine voilée au groupe Police que la phonétique écarte prestement !) est composé des neuf titres originaux composés à parts égales par les trois musiciens. Leur musique est, comme toujours, assez ouverte pour permettre l’exploration de tous les possibles, d’ailleurs ils ne s’en privent pas et les atmosphères qu’ils créent varient au gré des compositions. Enjouée ici, évanescente là, introspective ou rugueuse ailleurs, leur musique est une somme d’états d’âme, ou encore d’états d’être, qui suit son cheminement organique entre originalité pure et influences assumées. Tout est neuf dans cet enregistrement où l’écho lointain de leurs héritages respectifs résonne et ne pèse que pour le meilleur. L’humanité saxophonesque de Daniel Erdmann tutoie les sommets, enchâssée entre les lignes serpentines et évocatrices du vibraphone et du violon qui, quand ils prennent leurs soli, n’hésitent pas à amplifier cette impression de musique purement « humaine » qui touche au cœur l’auditeur. La somme des instruments et de leurs timbres est quant à elle la mise en scène idéale d’une musique libre qui affirme, au fil des enregistrements, une identité forte, une véritable originalité, de celle qui positionne une formation dans un espace réservé à ceux qui ont quelque chose à dire (que l’on n’oublie pas après l’avoir écouté).
http://www.daniel-erdmann.com/
JAMES BRANDON LEWIS . For Mahalia with Love
– sortie le 8 septembre
TAO Forms
James Brandon Lewis : saxophone ténor
Krk Knuffke : cornet
Chris Hoffman : violoncelle
William Pa rker : contrebasse
Chad Taylor : batterie
La grand-mère de James Brandon Lewis avait reçu la musique de Mahalia Jackson 1911-1972) comme un don du ciel. Après son magnifique « Jesup Wagon » qui mettait en lumière George Washington Carver (1860-1943), le saxophoniste originaire de Buffalo (N.Y) rend hommage à cette musique comme à sa grand-mère. Accompagné par la crème de la crème des musiciens créatifs de la grosse pomme, il donne à écouter une somme musicale aussi respectueuse qu’inventive des titres interprétés. Le quintet sait tirer vers des contrées libres cette musique qui a marqué plusieurs générations (et qui demeurent encore aujourd’hui une référence) et dont le mysticisme, et même le religieux, ne manquent pas d’affleurer en permanence à la surface de bien des thèmes. Quoi qu’il soit, l’harmonie qui se dégage de la musique du quintet est absolument admirable et chaque musicien apporte une présence d’une rare densité. Ainsi le collectif n’en n’est que plus beau et de bout en bout simplement époustouflant. Ignorer James Brandon Lewis est un crime de lèse majesté ! D’ailleurs Sonny Rollins lui-même a dit : « When I listen to you, I listen to Buddha, I listen to Confucius … I listen to the deeper meaning of life. You are keeping the world in balance. »
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