Le 03 novembre, jour de naissance de Walker Evans (1903), le photographe documentaire qui créa le genre communément appelé « photographie vernaculaire », je fis ma première incursion de l’année dans feu l’Amphi de l’opéra de Lyon qu’il faut nommer maintenant Opéra underground.
Je vous avais précédemment prévenu, c’était pour voir Ben Sidran, artiste aux casquettes multiples (pianiste, organiste, chanteur, compositeur, musicologue, journaliste, producteur…) suffisamment rare dans nos régions (la dernière fois, c’était en 1988 à Vienne) pour mériter mon déplacement et la sortie de l’attirail noir et blanc. Qu’en fut-il de cette soirée tant souhaitée ? Question intéressante.
L’auteur de la thèse de référence « A Cultural History of Black Music in America » publiée en 1972 et éditée sous le titre « Black Talk » (Da Capo Press) ne déçut pas un public a priori conquis d’avance.
Disert entre les morceaux, il parla avec érudition de Camus et de son Mythe de Sisyphe, de son enseignement sur la nécessité d’être heureux, de Federico Garcia Lorca ou bien encore il échangea avec son fils, Leo et Billy Peterson sur un mode humoristique très communicatif.
Mais ceci est une constante chez le chicagoan de naissance, ce qui ne l’empêcha pas de chanter et de jouer du piano comme à son habitude.
Avec ce style personnel, inimité car inimitable, de conteur urbain mélangeant les genres du discours, du jeu et du chant, l’intellectuel du jazz qu’il est entreprit de reprendre Dylan (auquel il a consacré un disque de relecture très personnel), Mose Allison (un vieux comparse), sans omettre de présenter de nouvelles compositions.
Il laissa en outre de l’espace à son fils sur trois morceaux et tout un chacun put noter le mimétisme du rejeton à l’égard de son père et de son chant en particulier, ce qui en soi n’est pas honteux. Entre le père et le fils, Billy Peterson, frère de Ricky et bassiste historique du quasi mythique et zimmermanien « Blood on the tracks », ne fit pas le saint esprit mais tint la contrebasse avec un jeu dont la rugosité aussi charnelle qu’inspirée rehaussa les propos de la famille ci-dessus dénommée, propos qui aurait pu devenir sinon melliflu du moins un tantinet palot entre le marteau et l’enclume de nos pavillons.
Cela me fit néanmoins oublier pour un temps que Roy Hargrove venait, de manière prématurée et définitive, de lâcher ses pistons (1969-2018).
De retour au cagibi, surtout ne pas écouter de trompette, me disais-je alors. Sait-on jamais. Plutôt les compositions du John suprême. « India » et/ou « Impression » qui furent enregistrées un autre 03 novembre au Vanguard, en 1961.
Facebook
Twitter
YouTube
LinkedIn
RSS