Des musiciens classiques qui improvisent, comme dans le jazz, ça existe. C’est ce que les 150 personnes réunies à Primarette dans le Nord-Isère ont pu constater samedi 25 septembre. Juste retour des choses d’ailleurs, il faut savoir qu’à l’époque de la musique baroque, les musiciens se lançaient dans des batailles d’improvisation : la chose était courante.
Il s’agissait là, en l’occurrence du quintette à vent lyonnais à vent Aslan qui accompagnait le pianiste Thomas Enhco.
Une soirée comme les affectionne Thomas Enhco, musicien de jazz à la formation classique qui n’aime rien moins que de traverser les frontières entre les deux musiques avec un sens aigu de l’improvisation.
Très en forme, porté sans doute par la chaleur du lieu, dans tous les sens du terme, il interpréta trois de ses compositions dont Ecclipse et la dernière en date, “Breathe”, qu’il a créée expliqua-t-il pendant le confinement, suite à une commande de “ La Belle Saison” . Ce qui lui a permis d’exprimer les sept états dans lequel l’a successivement plongé l’épisode pandémie, au plus fort de son expression : de la sidération, à l’abattement, en passant par le joie inextinguible de pouvoir enfin rejouer en concert…
Exit le confinement avec les autres œuvres jouées ce soir là, oscillant du classique au jazz avec une étonnante et très sauvage œuvre du compositeur brésilien Heitor Villa-Lobos (“Quintette en forme de Choros”) et une composition fort joyeuse et parfois tonitruante du Français Albert Roussel (“Divertissement op.6”)
Le concert se conclut avec un standard de la musique américaine, “Rhapsody in Blue” de Georges Gershwin. Une œuvre totalement écrite de A à Z, ne laissant en principe guère libre cours à l’improvisation.
Là, le quintette à vent complice y donne la réplique à un Thomas Enhco plus créatif que jamais, qui pour le plus grand bonheur du public s’écarte à de nombreuses reprises de la partition écrite pour mieux renouer avec les origines de ce « concerto jazz », véritable ode à Big Apple. Un délice.
Le jeune pianiste et compositeur qui a été auréolé (entre autres nombreuses récompenses) du Grand Prix Sacem Jazz en 2020, qui désormais a 33 ans, l’âge du Christ, prend une place à part dans le jazz français, assurément grâce à son talent de compositeur, à sa musique à la fois fluide, toute en finesse et très élaborée et à la sensibilité exacerbée.
A noter que ce concert, s’il s’est déroulé sous l’égide de Jazz en Bièvre était à l’initiative de “Les Allées chantent”, issues de l’Agence iséroise de diffusion artistique (AIDA) qui propose chaque année pas moins de quatre-vingts concerts en Isère (!), embrassant toutes les esthétiques. Des concerts gratuits, faut-il préciser, financés par le Département.
Line-up-Thomas Enhco, piano et composition ; Juliette Jolain, flûte ; Lorentz Réty, hautbois ; Théo Fuhrer, clarinette ; Antoine Aboyant-Billiet ; Pauline Chacon, cor.
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