Il y a des concerts qui sortent de l’ordinaire. Ceci est vrai également pour les musiciens qui impriment dès une première rencontre, une attention particulière à leur égard. S’ensuit une fidélité permanente, un attachement, un droit de suite. Il y a eu Miles, Baker, Pastorius, Pass, Gismonti, Paco, Renbourn, Evans : il y a aujourd’hui, Metheny, Scoffield, Blade, et tant d’autres. Eh bien mes amis, Yamandu Costa fera partie dorénavant de mon premier cercle.
Vendredi soir 1er décembre 2017, dans le cadre du 29 ème festival « Les Guitares », une salle pleine a accueilli Yamandu Costa – guitariste émérite brésilien – autodidacte et jouant sur une guitare 7 cordes.
Une sacrée soirée traversée par la virtuosité, l’improvisation, la créativité, la générosité.
Né à Passo Fundo, Yamandu Costa a commencé à jouer de la guitare à l’âge de sept ans et jusqu’à ses 15 ans, son unique école fut la musique régionale du Sud du Brésil, de l’Argentine et de l’Uruguay. Après avoir écouté Radamés Gnatalli, il fit de nouvelles recherches sur d’autres musiciens brésiliens comme Baden Powell, Tom Jobim, Raphael Rabello.
Et c’est maintenant un guitariste mature, totalement habité par son instrument qu’il nous a offert un répertoire personnel dans une liberté de jeu quasiment inégalée : une main droite précise, incisive, percutante pour le moins, mêlant arpèges, solos, frappes, balayement à des vitesses impressionnantes. Ça roule, roucoule, blackboule tous nos sens. Une main gauche tout aussi rebelle, sans aucune contrainte, parcourant les cases au de-là de ce que même les plus doués des mortels ont accès. La guitare 7 cordes est ici utilisée à son maximum, non pas comme une guitare 6 cordes avec une corde additionnelle mais comme un instrument à part entière.
Un véritable extra-terrestre cet Yamandu.
Précisons qu’avant tout, cette technique et cette énergie phénoménale sont réglées au service de ses compositions toutes empruntes d’intensité et de nostalgie propre à l’âme sud-américaine.
Impossible de classer le courant musical de Yamandu Costa – si ce n’est de dire qu’il lui est propre, qu’il émane fondamentalement de la musique traditionnelle brésilienne – choro, tango, bossa nova – tout en intégrant de multiples autres cultures musicales.
J’ai entendu du Stravinsky (Le Sacre du printemps), du jazz – (des harmonies couvrant des accords à 5, 6, 7 voix), du flamenco – (comment ne pas penser à Paco de Lucia ?), de la musique de films hollywoodiens (The Dear Hunter).
De véritables compositions orchestrales à dire vrai tant le jeu des voix, des mouvements, des alternances de solos, de climats et de rythmes se conjuguent dans un discours subtil et toujours maitrisé.
Tout cela dans une légèreté, une spontanéité, une joie déconcertante au regard de la complexité des compositions.
On sent au travers de la musique de Yamandu Costa, une fierté, un amour, une fidélité pour ses origines et en même temps une ouverture assumée sur d’autres cultures.
Un concert de plus de deux heures qui s’est terminé par un tango de Piazzolla dans un brillant et émouvant arrangement qui nous a permis d’accoster sereinement au port après un voyage intense et lumineux.
Vraiment un beau voyage.
Un grand merci à Jean-Claude Ballet – directeur du festival « Les Guitares » de nous avoir fait (re) découvrir ce grand artiste.
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