La nouvelle a bouleversé les amateurs de Jazz : le trompettiste américain Roy Hargrove, fréquent visiteur de Jazz à Vienne est décédé à l’âge de 49 ans. Sa dernière venue sur la scène du théâtre antique est récente : elle date du 12 juillet dernier. Stéphane Kochoyan, l’ancien directeur de Jazz à Vienne qui l’avait invité il y a trois semaine à Nîmes, l’avait « entendu jammer comme s’il était en train de brûler ses derniers jours… »
Le monde du jazz est en deuil. L’un des plus brillants trompettistes de l’époque, Roy Hargrove n’est plus. Il s’est éteint dans la nuit de vendredi à samedi à New York. Il avait 49 ans.
Le trompettiste, qui avait été hospitalisé pour des problèmes rénaux, était en dialyse depuis plusieurs années. Il a succombé à un arrêt cardiaque.
Ce musicien surdoué et particulièrement précoce s’est produit pour la dernière fois à Jazz à Vienne le 12 juillet dernier, en première partie du chanteur Greg Porter.
Un concert qui est resté gravé dans les mémoires des jazz fans. C’était la quatrième fois qu’il arpentait la scène du théâtre antique de Vienne : on avait déjà pu l’ouïr, en 2002, 2009 et 2015.
Né le 16 octobre 1969 à Waco, au Texas, Roy Hargrove incarnait la charnière entre la tradition du jazz, le bebop, et des genres très variés comme le hip hop, le R’n’B et les musiques du monde. Un musicien sans frontière.
Remarqué par Wynton Marsalis
Remarqué dès l’âge de 18 ans par Wynton Marsalis, il s’était démarqué dès la fin des années 80, enregistrant ses premiers disques en 1988 en tant que sideman (accompagnateur) et dès 1990 en tant que leader.
Après une année passée au fameux Berklee College of Music de Boston, l’ENA du Jazz, Roy Hargrove s’est installé à New York où il a fini ses études musicales et a très vite pris son envol.
À vingt-cinq ans, il signait sur le fameux label Verve, où son premier projet, « With the Tenors of our Time », en 1994 et sur lequel il rendait hommage à la tradition du jazz, invitant pour l’occasion de prestigieux saxophonistes, avant de célébrer Charlie Parker dans un autre projet l’année suivante.
Il a travaillé très tôt avec de nombreux artistes de premier plan tels que Herbie Hancock, Sonny Rollins, Oscar Peterson, Roy Haynes, Shirley Horn, Steve Coleman, Christian McBride et le trompettiste Wynton Marsalis qui l’avait découvert.
Roy Hargrove s’aventurait aussi volontiers dans d’autres champs musicaux, auprès d’Angelique Kidjo Erykah Badu, D’Angelo ou le rappeur Common, et d’autres….
En guise de laboratoire de ses rapprochements entre jazz, hip-hop, funk, soul ou gospel, il animait d’ailleurs un groupe baptisé « The RH Factor ».
Les Grammy Awards l’avaient distingué à deux reprises, dans deux genres musicaux distincts. D’abord, en 1998 au titre de la « Meilleure performance en musique latine » pour son album « Habana » (1997), un projet afro-cubain enregistré à La Havane. Puis, en 2003 au titre du « Meilleur album de jazz instrumental » pour « Directions in Music », en 2002, un disque live enregistré à Toronto avec le pianiste Herbie Hancock et le saxophoniste Michael Brecker.
Un concert d’anthologie
Malgré ses ennuis de santé, Roy Hargrove continuait envers et contre tout à arpenter les festivals et les clubs de jazz. Selon certains témoignages, il était apparu fatigué, particulièrement las, lors de ses derniers concerts.
C’est ce que confirme Stéphane Kochoyan, ancien directeur de Jazz à Vienne et organisateur du Festival de Jazz à Nîmes qui l’avait accueilli il y a trois semaine.
Dans un tweet, Stéphane Kochoyan lui rend hommage : « Roy Hargrove … si tôt … je ne peux le croire, ce garçon si inspiré que nous avons accueilli à Orléans, Barcelonnette, Vauvert, Vienne ; et encore Nîmes Métropole voici moins de trois semaines pour un concert d’anthologie, dans la lignée des plus grands quintets de jazz du monde, à peine avait il quitté la scène du Théâtre de Nîmes, il s’est rendu pour jammer en club au 9, comme s’’il était en train de brûler ses derniers jours et surtout de jouer , jouer et encore jouer comme si c’était le dernier chorus … Je me suis même permis de demander à son manager et ses musiciens de prendre soin de lui et d’être extrêmement prévenants… Ce grand trompettiste comptait parmi mes musiciens préférés et ne méritait pas de partir si vite, nous avions tant besoin de lui … je suis effondré… »
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