On ne dira pas que ce sont deux inconnus ou deux jeunots qui escaladeront ce soir le praticable menant à la scène du Théâtre antique. Ou deux inconnus. Que ce soit Marcus Miller ou Rhoda Scott, les deux artistes doivent figurer parmi ceux qui ont le plus hanté les différentes éditions de Jazz à Vienne. Le festival rappelle d’ailleurs opportunément que c’est ici, il y a 14 ans, que Rhoda Scott, orgue hammond de toute éternité, avait réuni sur cette même scène et pour la première fois un orchestre strictement féminin.
La chose est moins difficile qu’il n’y paraît ; aujourd’hui tout au moins, tant la scène jazz sait habilement et sans le crier forcément toujours sur les toits, se féminiser. En 2004, une telle approche était encore si peu pratiquée que Rhoda Scott avait cru bon d’enfoncer le clou. Avec un certain succès. Des années après et alors qu’elle fête ce soir (ou le lendemain 4 juillet) ses 80 ans, la musicienne a eut l’idée de reconstituer à la fois ce projet et cette formation.
On retrouvera donc près d’elles quelques talents déjà présents il y a 14 ans mais aussi quelques nouvelles figures. Et surtout, clin d’œil on ne peut plus masculin histoire de…, Bernard Pretty Purdie, l’un des batteurs les plus influents et les plus diserts de la scène américain, qui figure aux côtés de tant d’artistes, de James Brown à Miles Davis, de Gato Barbieri à Jimmy Smith. De quoi expliquer sa présence ce soir, le temps d’un pas de deux aux côtés de son aînée.
Toutefois, le cœur de ce concert anniversaire demeurera bien cette réunion de musiciennes : Sophie Alour, Lisa Cat-Berro et Géraldine Laurent aux saxophones, Airelle Besson à la trompette. Plus une percussionniste, Julie Saury.
Quant au menu de soirée, laissons les choses se faire : l’organiste aime improviser au dernier moment, d’autant plus lorsqu’ elle est bien entourée, et elle devrait comme souvent mêler ses dernières créations et quelques-uns des grands standards dans lesquels elle excelle.
Marcus Miller chou-chou de Jazz à Vienne
Quant à Marcus Miller, il s’agit avec Vienne d’énièmes retrouvailles, que ce soit au théâtre antique ou sur d’autres scènes. Car le bassiste est sans doute aujourd’hui l’un des plus fidèles du festival viennois : les carrières de l’un et de l’autre se font d’ailleurs écho. C’est au début des années 80, lorsque naissait Jazz à Vienne, que Marcus Miller met ses pas dans ceux de Miles Davis.
On connaît la suite, dont ce « Tutu », auquel il fut tant associé et qui demeure aujourd’hui l’un des épisodes les plus marquants dans le devenir du trompettiste et de l’aura particulière qu’il ne cessera plus de propager.
Ce soir, place à Laid Black, dernier opus du bassiste et qui est au cœur de sa tournée 2018. A ses côtés, quelques musiciens précieux et déjà courtisés : Alex Han, Alex, Brett Williams (dr) et Russell Gunn (tp). De quoi lui fournir certes un écrin à sa mesure, mais de découvrir, on l’espère en tout cas, une nouvelle facette de ce musicien qui ne saurait se résumer à son jeu talentueux. C’est d’ailleurs, face à un public largement acquis et depuis longtemps, le seul risque encouru : de rester en deçà des attentes. Mais, outre le talent, la générosité et la joie si communicative du musicien lorsqu’il arpente la scène, le mettent largement à l’abri de ce type de déconvenues.
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