Le moins que l’on puisse dire, c’est que ce concert à la salle Aristide Briand de Saint-Chamond aura débuté d’une façon étrange. Le premier morceau est, en effet, une anomalie dans le spectacle de ce soir. On le dirait presque destiné à annoncer ce que la suite ne sera pas.
Le quintet DVRK Funk (prononcé dark funk), composé de Kassa Overall (Batterie), Eric Wheeler (Contrebasse), Michael King (Piano), Theo Croker (Trompette) et Anthony Ware (Sax ténor), ouvre ainsi sans Dee Dee par un bebop rapide et bavard, dans le style de Charlie Parker. Ce titre est certes impeccablement exécuté mais presque machinalement et par des musiciens ne montrant aucune émotion. A voir le planning de tournée de cette formation, on imagine que la fatigue n’est pas étrangère à cette apathie.
Dee Dee moi tout
Bref ça démarre doucement mais Dee Dee Bridgewater veille au grain et dissipe bien vite nos doutes naissants. Tout sourire, grand chapeau, lunette de soleil et couleurs chatoyantes, Dee Dee fait son entrée. Elle dépose ses quelques accessoires sur une table où sont déjà disposés fleurs, bougies et rafraichissements. On la sent ici chez elle et elle se met à l’aise.
Dans un français impeccable, Dee Dee nous explique que les morceaux de ce soir sont, pour la plupart, tirés de son album « Dee Dee Feathers ». Ils ont en commun d’avoir soit été composés par un/une néo-orléanais(e) ou de parler de la Nouvelle-Orléans.
La chanteuse attaque son show par une reprise bluesy de Harry Connick Junior. Les chansons suivantes, reprises de Mahalia Jackson, Louis Armstrong et bien d’autres, sont dans des styles variés: du standard de Jazz au New Orleans un peu fanfare second line, en passant par des balades ou des titres plus Soul/Gospel, gorgés d’orgue Hammond.
Dee Dee nous tient dans le creux de sa main. Elle nous fait passer du rire, avec ce refrain « I’ve got a big fat man who loves me all night long », aux pleurs avec sa reprise bouleversante de « What a wonderful world » de Louis Armstrong. Très volontiers séductrice avec un chant très langoureux, Dee Dee sait également être aussi puissante qu’Aretha Franklin ou « rugueuse » lorsque elle chante comme Armstrong.
Love is all
Dee Dee impressionne par sa tessiture, par la maitrise de sa voix et l’énergie qu’elle déploie. Même si ses acolytes s’en tire honorablement, il faut bien avouer que c’est elle qui réussit à faire vraiment décoller ce concert. La rythmique est bonne, il est vrai. Toujours présent pour soutenir la chanteuse, piano, contrebasse et batterie se fendent également de quelques jolis soli. Les soufflants, quant à eux, même s’ils reprennent vie, petit à petit au cours du concert, restent un ton en dessous.
Généreuse jusqu’à la fin, Dee Dee nous offre en rappel un dernier titre très New Orleans. Le public est debout et conquis. Avant de nous quitter, fidèle à son patronyme (Bridgewater), elle nous encourage à nous rapprocher les uns des autres, parce que comme elle dit « on a tous besoin d’amour ».
Lorsqu’arrivent les dernières notes, Dee Dee remet son chapeau. Elle part, mais son sourire reste sur nos lèvres… à bientôt Dee Dee.
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