Un concert un peu hors du temps : Champian Fulton. Chanteuse ou pianiste. Les deux à la fois mais qui sert l’autre ? La chanteuse, au timbre de voix qui se perd en nuances et qui rappelle quelques unes de ses grandes aînées, parvient à chaque fois à introduire le doute. Le piano pour servir la voix ? La voix pour mieux mettre en valeur le piano ? En tout cas, dans les deux registres, la musicienne convainc en reconstituant sous nos yeux un paysage musical estompé. Douceur, sérénité, décontraction. Et cette façon de fondre ensemble claviers et voix, au point de nous faire croire que les deux « instruments » ne font qu’un. La chose n’est pas banale.
Scott Hamilton : saxophoniste au long cours
Mais, en sus, la chanteuse, plutôt présente à New-York que dans la Drôme a donc à ses côtés Scott Hamilton, saxophoniste. Son originalité ? Une façon de jouer du sax a contrario du chemin dominant. Ici point d’exacerbation ou d’éclatement dans les aigus. Au contraire, chez ce musicien né aux Etats-Unis mais très présent désormais sur la scène européenne, c’est une attention particulière portée à chaque note, à chaque inflexion. Su plusieurs thèmes joués dans ce théâtre de verdure de Mollans, le cuivre laisse découvrir une résonnance inédite : ainsi sur ce beau I cried for you, démarré avec grâce et un zeste de malice par Marcian Fulton et poursuivie donc par son aîné. Ou dans ce This is always, ou Blues by Scott.
On s’en étonnera ? Thème récurrent du concert, l’amour, la passion. D’Exactly like you à I hadn’t anyone till you jusqu’à ce thème repris au rappel, I’m confessing that I love you. Le tout sur fond d’été, en dépit des moucherons qui inquiètent ou dérangent les deux complices.
Une évocation d’un paysage sonore oublié ?
Au delà du côté anachronique d’un tel concert, on redécouvre une approche musicale faite de retenue : façon de placer la voix, de ne pas se hâter sur un solo, de laisser la contrebasse et les drums s’immiscer sans avoir à hausser le ton. Reconstitution d’un paysage sonore oublié ? A leurs côtés en effet, il y a d’abord Gilles Naturel, à la contrebasse. Peut-être trop discrète mais une présence de tous les instants et quelques interventions en solo pleines de nuances. Et aux drums, Mourad Benhammou : l’art de constamment saupoudrer le tempo de mille nuances, de revisiter le standard à travers sa vision et de sa touche personnelle.
Au final, c’est sans avoir jamais haussé le ton que le quartet s’en est allé, dans un théâtre de verdure qui affichait complet.
De bonne augure pour cette édition enfin arrivée.
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